Il sévit en ligne : un arnaqueur des Émirats arabes unis en quête de proies mauriciennes

Soyez sur vos gardes. Un arnaqueur opérant apparemment aux Émirats arabes unis (EAU) tend, depuis peu, un appât à des Mauriciens. Il fait croire qu’une personne décédée en 2008 portant le même nom que vous possède 18 400 000 dollars américains (Rs 800 millions) sur son compte à la National Bank d’Abu Dhabi. Il vous invite à faire une réclamation en ligne, en vous faisant passer pour le bénéficiaire. Vous obtiendrez la moitié de la somme et lui, le reste. 

Tout a commencé le mardi 3 mai 2022 lorsque j’accepte une demande d’ami sur Facebook d’Abdulkarim Ghulamjan Alzarouni, qui se présente comme le Deputy General Manager Audit and Compliance à la National Bank d’Abu Dhabi. 

Dès le départ, je sentais qu’il y avait anguille sous roche, car des professionnels de ce calibre ne communiquent pas à travers Facebook. Mon flair ne m’a pas trompé... Le lendemain lorsque j’ai fait une recherche sur ce monsieur, j’ai découvert qu’Abdulkarim Alzarouni est effectivement le Deputy General Manager Audit and Compliance à la National Bank d’Abu Dhabi, mais sa photo n’est pas celle qui est affichée sur le compte Facebook. Clairement, c’est un cas d’usurpation d’identité. Quelle entrée en matière palpitante pour tenter d’élucider le mécanisme qu’il utilise pour leurrer des naïfs.

Relation amicale

Contrairement aux escrocs en ligne d’autres pays, celui-ci, privilégie une approche humaine. Il s’ingénie à donner l’impression de vouloir nouer une amitié durable et sincère. Tous les jours, il m’envoie un message pour prendre de mes nouvelles et de celles de ma famille et s’enquérir du climat à Maurice, du taux de vaccination contre la Covid-19 et ainsi de suite. Il me confiera même qu’il est marié et a deux fils : « I am 59 years old, I was married 31 years ago, I have got two sons... they are grown. Terik is a Medical doctor and Hamdan a pilot. I have also got three grandchildren! »

Le 6 mai, il m’annonce qu’il est en contact avec des Mauriciens et qu’il a séjourné dans l’île en 2015. « Mauritius is a nice country. And one of the best country.... A lot of Mauritians live here, and they also come for business and as tourist here in UAE.  I visited Port Louis on my vacation in 2015. That was 7 years ago! » 

Pour me convaincre de la sincérité de sa démarche, il m’envoie une série de photos et de vidéos supposément de lui. En fait, ce sont des photos du pseudo Abdulkarim Alzarouni.

De Facebook à WhatsApp

Une fois que le lien est établi, il passe à un stade supérieur. Le vendredi 13 mai, il m’invite à migrer notre contact vers WhatsApp. 

« Please brother. I will like to have more conversations with you, regarding why I contacted you... I will also like us to keep in touch for friendship cooperation and future references. However I don’t often write here due to work schedules and other activities. I am always active and write often on WhatsApp. I will suggest we be in connection through WhatsApp, if you don’t mind for fast and easy communication. do you have WhatsApp? » 

Il glisse subtilement cinq mots lourds de sens : « ...regarding why I contacted you. »

Un héritage

Ainsi, il me contacte sur un numéro enregistré à Dubaï, le +971 58 956 3374. Là encore, il ne se précipite pas à abattre ses cartes. Il garde le suspense jusqu’à ce que je l’interroge. Ainsi, il m’annonce avoir jeté son dévolu sur moi en lien avec une affaire d’héritage non réclamé d’un ancien client qui porte le même nom que moi, nommément un certain Omar B. Eshan.

« I will need your assistance regarding an unclaimed inheritance fund from my bank. I actually contacted you because you have same surname with my late client. Mr Omar B Eshan, here in my bank list.
I will take my time to draft a letter and forward everything you need to know about my late client and regarding why I need your assistance brother. »

Erreur

Je lui réponds que mon nom de famille n’est ni Eshan non plus Omar. Pas le moindre du monde décontenancé, il prétendant avoir fait une erreur.

« Sorry brother, I was the one making a mistake... You know I was busy in the office and at the same time writing to you so I made a mistake using Eshan instead of Dinally. »

Ainsi, il dévoile son visage de « brouteur en ligne » – comprenez « des moutons qui se nourrissent sans effort » en tentant de me convaincre que le fait que mon patronyme ne soit  pas Eshan comme son défunt client ne pose aucun problème. De plus, il me demande de lui faire parvenir une copie de mon passeport. Sa requête est restée lettre morte.

« That won’t be a problem, since your name is Eshan you can still make the claim
Can I have your passport please?  What matters is that your name Eshan appears in the late Omar bank files and in my bank computer.»

Rs 400 millions à empocher

L’escroc en ligne ne veut nullement lâcher prise bien que je lui fasse bien comprendre que je n’ai nullement l’intention de réclamer de ce pseudo-héritage. Pour essayer de dissiper tout doute, il m’envoie une nouvelle proposition tout en changeant le nom de son défunt-client de « Eshan » à « Dinally ». Il ne manque pas d’audace ! Et il me propose 50 % des 18 400 000 dollars américains, soit Rs 400 millions.

Couper tout contact

Une fois au courant de sa machination perfide, j’ai évité soigneusement d’être absorbé dans son guet-apens en coupant tout contact sur Facebook et WhatsApp. Il vaut mieux ne pas s’aventurer sur ce terrain miné.