L’aboutissement de toute une vie. C’est ainsi que le président de la Street Vendors Association (SVA), Hydar Ryman, qualifie le projet du Victoria Urban Terminal, qui abritera le Hawkers Mall à partir de 2021. Il estime que le Metro Express va compenser le manque à gagner que sont en train de subir l’ensemble de la communauté des marchands de rue.
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Certains marchands n’ont pas encore digéré la délocalisation de 2016 et appréhendent ainsi toute nouvelle décision
Comment les marchands de la place Decaen vivent-ils la nouvelle relocalisation de la semaine dernière ?
Tout d’abord, laissez-moi vous dire qu’au cours de ses 20 années d’existence, la SVA a toujours prôné le dialogue et a tout le temps travaillé en étroite collaboration avec les autorités gouvernementales et municipales. Cette énième délocalisation concernait quelque 574 marchands et elle s’est déroulée dans une ambiance bon enfant et dans un esprit d’équipe. Le ministère des Infrastructures publiques et la municipalité de Port-Louis nous ont grandement aidés. Il faut souligner que depuis deux ans, les marchands savaient qu’ils devaient être relocalisés en raison des travaux du Metro Express. Ce n’est pas du jour au lendemain qu’on nous a dit de vider les lieux.
Certains marchands ont n’empêche tenu à exprimer leur mécontentement. Pourquoi ?
Au sein de la SVA, nous avons tout le temps œuvré en faveur des marchands ambulants et nous continuons à le faire. Des 574 marchands qui ont été relocalisés de la place Decaen, on devrait s’attendre à avoir quelques mécontents. Mais en tant que président de l’association, je ne les condamne pas, car ce sont des pères de famille et des femmes qui tentent de gagner leur vie dignement. Certains n’ont pas encore digéré la délocalisation de 2016 et appréhendent ainsi toute nouvelle décision. Aussi, après trois ans à la place Decaen et alors qu’ils commençaient à se faire une nouvelle clientèle, ces marchands se disent inquiets de leur sort et surtout cette délocalisation intervient à l’approche des fêtes de fin d’année.
En tant que marchand également, ne partagez-vous pas leur crainte ?
Définitivement. Je suis marchand depuis plus de 30 ans, mais je suis aussi père de famille. C’est tout à fait normal que je sois également inquiet. Mais je ne veux pas que cette crainte m’envahisse et m’empêche de voir l’avenir. Cela risque de me freiner dans ma prise des décisions, car je sais que l’avenir sera très brillant pour la communauté des marchands avec la construction de l’Urban Terminal. Avec le dialogue, on est parvenu à faire comprendre aux marchands qu’il est temps de tourner la page. Aussi, je dois dire que pour la première fois, les marchands ont été relocalisés dans des endroits pourvus de toutes les facilités telles de l’électricité, l’eau, la sécurité, etc…
Quelques marchands ont été relocalisés à la rue Ingénieur (à l’arrière de la gare). La fermeture de la gare Victoria n’est-elle pas une autre source d’inquiétude pour eux ?
Ils sont 49 marchands à travailler à la rue Ingénieur et depuis la fermeture de la gare Victoria, certains d’entre eux m’ont fait part d’un manque cruel de clients ces derniers jours. Vu que les arrêts d’autobus ont été déplacés, les passagers empruntent d’autres rues pour aller prendre le bus et cela représente un manque à gagner pour ces marchands. Mais nous sommes en train d’étudier la situation et si le problème persiste, il va falloir trouver une solution. Au départ, la place Decaen faisait face à ce même problème, mais au fil du temps, elle s’est transformée en une véritable foire.
Jusqu’à tout récemment, les marchands étaient contre l’idée d’aller travailler au Ruisseau du Pouce. Pourquoi ont-ils changé d’idée ?
Auparavant, le Ruisseau du Pouce n’était pas aménagé convenablement et la place Decaen s’était déjà transformée en un lieu très fréquenté par le public. Elle dominait en quelque sorte toutes les petites foires qui se trouvent aux alentours. Mais aujourd’hui, Decaen n’existe plus. Des 574 marchands, 341 ont été relocalisés à la Gare du Nord, 184 au Ruisseau du Pouce et 49 à la rue Ingénieur. Il suffit de se rendre au Ruisseau du Pouce entre 11h30 et 13h30 en jour de semaine pour voir comment cet endroit grouille de monde à présent. Pour la petite histoire, laissez-moi vous dire qu’au départ, la Vice-première ministre, Fazila Jeewa-Daureeawoo, nous avait fait comprendre que la municipalité avait identifié trois sites pour relocaliser les marchands : au Champ-de-Mars, à la rue Labourdonnais et aux Salines. La SVA a refusé et le site du Ruisseau du Pouce est par défaut le plus approprié.
Venons-en au Victoria Urban Terminal. Vous affichez une confiance que ce projet changera la vie des marchands.…
Que voulez-vous ? C’est l’aboutissement de toute une vie pour la communauté des marchands ambulants. Maintenant que le ‘lease agreement‘ a déjà été signé et que le projet est bel et bien
« on », je ne demande plus à ce que l’Urban Victoria Terminal voit le jour dans les délais prescrits, soit dans environ deux ans et demi. Pour la première fois, les marchands auront la possibilité de devenir propriétaires de leurs étals dans le Hawkers Mall et des milliers de Mauriciens vont devoir passer par l’Urban Terminal au quotidien. Donc, le Metro Express viendra compenser le manque à gagner que subissent les marchands depuis ces deux dernières années.
Dans le passé, vous fondiez beaucoup d’espoir sur le projet du Hawkers’ Palace. Ne craignez-vous pas d’essuyer un autre revers ?
‘Satt bwar dilé so ene sel fwa’ ! Tous les membres de la SVA n’ont jamais cessé de faire entendre leur voix. Nous avons lutté depuis des années pour avoir un endroit convenable pour pouvoir travailler. En 2005, mes collègues marchands et moi avions travaillé avec la même vigueur que le Hawkers’ Palace se concrétise. Tout avait été mis en œuvre pour que les marchands puissent avoir un endroit décent. Mais après les élections générales en 2005, la communauté des marchands s’est laissé prendre au jeu des politiciens. Personne n’est à blâmer. À cette époque, nous n’avions pas beaucoup d’expérience et nous n’avons pas été en mesure de défendre le projet du Hawkers’ Palace. Mais aujourd’hui, nous sommes mieux armés et nous allons travailler en collaboration avec le gouvernement pour que le projet aboutisse. Croyez-moi, nous n’allons pas commettre la même erreur une fois encore !
Le contexte électoral joue aussi en votre faveur cette fois. N’est-ce pas ?
La SVA est une organisation sociale, bénévole et apolitique. De 2000 à 2019, nous avons collaboré avec trois différents gouvernements. Chacun a essayé d’aider les marchands à sa façon et il y a eu plusieurs réalisations au cours de ces 20 ans. Aujourd’hui, la SVA s’est bien positionnée à travers le pays et nous comptons plus de 1 400 marchands dont la grande majorité réside à Port-Louis. Le message que je leur ai transmis, c’est de mettre une croix sur le passé et de foncer vers l’avenir, surtout avec la réalisation du Victoria Urban Terminal.
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