Ganessen Chinnapen trouve primordial que le pays ait un ministre des Finances à plein-temps. Le Development Economist estime aussi que l’émergence du nationalisme et les amendements apportés au traité entre Maurice et l’Inde auront un impact certain sur le Global Business cette année.
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« Maurice a besoin d’une commission de planification nationale. »
En général que pouvons-nous attendre de 2018 en termes de développement économique ?
Le développement économique sera conduit par des investissements publics en infrastructures et le projet Metro Express offre des perspectives intéressantes en termes d’activités économiques pour l’économie du pays. La création d’emplois directs et indirects en lien avec ce projet aboutira à des résultats dans une économie traînante. Il faut cependant souligner que ce projet mené par l’État ne va ni restaurer la confiance des investisseurs, ni stimuler l’investissement privé.
Il est primordial que le pays ait un ministre des Finances à plein-temps. Car il donne une indication que Maurice s’engage à revitaliser l’économie, à favoriser la prospérité économique, à attirer des investissements directs étrangers (IDE) et à éperonner la confiance des investisseurs.
En outre, Maurice a la responsabilité légale de réduire la dette nationale à 50 % du Produit intérieur brut (PIB). À moins que des réformes structurelles ne soient mises en place, les perspectives économiques semblent moroses, car les sentiments des investisseurs et la confiance des entreprises restent faibles.
On mise beaucoup sur le secteur de la construction et ses retombées sur l’économie. Avons-nous raison de rester optimistes, surtout avec les délais de l’octroi des contrats ?
Ce secteur a été en contraction depuis la crise financière mondiale qui a occasionné des pertes d’emplois. Il y a des signes encourageants en termes d’activités des affaires dans le secteur de la construction avec les projets de villes intelligentes où plusieurs Expressions of Interest ont été formulées et des permis accordés en 2017. Cela a stimulé une croissance sectorielle.
Ce secteur, qui représente 10 % de la main-d’œuvre à Maurice, a contribué à une moyenne de 4 % au PIB. Nous devons nous assurer qu’il n’y ait pas de retard dans la réalisation des projets et de dépassement de coûts, ce qui aurait pour résultat de provoquer des incertitudes et de freiner la croissance.
Quel sera l’impact du salaire minimal ?
L’introduction du salaire minimal est une initiative louable puisqu’elle a pour objectif de réduire les inégalités et les disparités au niveau des revenus dans le secteur public et privé. C’est une bonne chose pour les foyers. Nous verrons comment les sociétés privées réagiront à cette révision à la hausse de leur budget de salaire. Toutefois, cela se transposera à travers une hausse de prix des biens et des services sur le marché pour accommoder avec la hausse du budget de salaire ou alors qu’elles acceptent unilatéralement une faible marge bénéficiaire.
Les travaux de construction du Metro Express démarrent ce mois-ci. Quels en seront les premiers effets sur le secteur de la construction ?
Il y aura définitivement un impact, mais il est important de situer l’ampleur du projet sur le secteur de la construction selon le cadre opérationnel de Larsen & Toubro. S’il est semblable à celui de Sinohydro où il apporte l’ensemble de la main-d’œuvre, des équipements et des machineries, on comprend dès lors que la majeure partie des injections financières resteront en Inde et cela entravera la croissance du secteur de la construction.
On considère souvent qu’il y a un lien de cause à effet entre le prix des carburants et l’inflation. Dès que les prix baissent ou augmentent, l’inflation suit la même tendance. Raison : les carburants constituent un intrant considérable dans l’économie. Ils sont utilisés pour des activités quotidiennes, telles que l’alimentation, le transport, la production et le secteur manufacturier. Si cet entrant prend l’ascenseur, il en va de même pour les coûts des produits. Un accroissement du prix des carburants créera des tensions inflationnistes donnant lieu à une majoration des prix de plusieurs produits.
Le Premier ministre table sur une croissance supérieure à 4 % et une transformation de l’économie. Vos commentaires…
L’économie est à la croisée des chemins. Il est urgent d’apporter des réformes structurelles dans la gestion de la dette, la discipline fiscale, les pensions et les aides sociales. Il faut aussi revoir l’encadrement et les mesures incitatives pour attirer les IDE si nous voulons un bon niveau de croissance en 2018 et une économie résiliente.
Autrement, les perspectives économiques pour 2018 paraissent sombres, car il n’y a aucune amélioration de l’humeur des investisseurs et de la confiance des entrepreneurs. Depuis 2009, la croissance a été léthargique. Presque neuf ans plus tard, il n’y a pas eu de transformation systémique de l’économie pour revitaliser l’environnement des affaires et initialiser la croissance.
Il est temps de transformer Maurice, stimulé par l’innovation. Le pays peut vendre son expertise et son expérience en Afrique. Il a aussi besoin d’une commission de planification nationale. Il faut cesser avec la planification ad hoc pour s’ouvrir à l’avenir.
Comment voyez-vous l’évolution du marché de l’emploi ?
L’inadéquation continue du marché de l’emploi a rongé l’économie engendrant le chômage parmi les jeunes. Nous comptons 49 000 sans-emploi, dont 23 000 sont âgés entre 16 et 24 ans. Le ministère de l’Emploi y souscrit entièrement en introduisant des mesures pour atténuer l’inadéquation à travers un programme pour l’autonomisation des jeunes. Nous devons préparer les jeunes à être employables et les former à des métiers professionnels ayant des caractéristiques techniques haut de gamme. Les compétences qui seront nécessaires pour la prochaine décennie devront être axées sur le raisonnement critique, un leadership flexible, de la personnalité et du flair.
On a l’impression que la politique l’emportera davantage sur les enjeux économiques, d’autant qu’on s’achemine vers des élections en 2019. Partagez-vous cet avis ?
C’est triste de constater que le zèle politique a toujours éclipsé la logique économique avec plusieurs mesures politiques au détriment de l’économie mauricienne, avec pour conséquence un gaspillage des fonds publics et des projets fiascos, entre autres.
Maurice, en tant que petit État insulaire en développement, a besoin d’une discipline fiscale et d’une prudence financière dans la gestion des fonds publics. Mais les politiciens ont gâché ces finances publiques. Il convient de mentionner que durant deux ans, les politiques ont fait la une de tous les médias. Voilà pourquoi l’intérêt sur les fondamentaux économiques est passé au second plan. Cela a été cloué au pilori avec un ministre des Finances à temps-partiel.
Pour Statistics Mauritius, la prudence est de mise avec un statu quo de 5,5 % du secteur des services financiers. Y a-t-il un risque de ralentissement dans le Global Business ?
Le Global Business est aussi à un tournant suite à la volonté de plusieurs pays de rétablir le nationalisme, ce qui explique le Brexit et la victoire de Donald Trump. Notre secteur des services financiers a toujours été le moteur de croissance. Il faut anticiper le fait qu’il y aura une répercussion majeure en 2018 avec les amendements au traité fiscal avec l’Inde et que Maurice soit cité de façon répétitive dans la presse internationale en tant que paradis fiscal.
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