Ganesh Chaturthi : ces doigts de la dévotion

Leurs doigts expriment leur dévotion et leur passion. Krishen Appa, Ramma Chandrassen et Seewanand Tannoo proposent des sculptures de la divinité Ganesh dans le cadre de la fête Ganesh Chaturthi. Ils oscillent entre les styles traditionnel et moderne.

Depuis presque 50 ans, Krishen Appa sculpte des murthis (représentations matérielles) de Ganesh. Il tient cette passion de son père et de son oncle qui l’ont, eux, héritée de leur père. Selon Krishen Appa, cet art leur a été légué par leur arrière-grand-père.

Ce dernier, originaire de Kolhapur en Inde, a immigré à Maurice le 31 mars 1860. « Ce n’est que quelques mois après la naissance de mon grand-père en 1880 qu’il a décidé de célébrer Ganesh Chaturthi. Il a commencé par sculpter des statuettes. Il habitait auparavant à Bassin-Blanc. La tradition s’est ainsi perpétuée à travers les générations », relate cet habitant de La Vanille, Vacoas.

Son fils et ses neveux assureront la relève. Krishen Appa note que les jeunes apportent un souffle de nouveauté aux murthis. « Ils sont très connectés et savent ce qui se passe ailleurs. Ils y puisent leur inspiration. Ils apportent un cachet spécial à la décoration des Ganapati (autre nom de Ganesh ; NdlR) », dit-il avec le sourire.

Depuis une quinzaine de jours, les Appa sont à pied d’œuvre quotidiennement, de 19 heures à minuit. « Nous devons reprendre le travail le lendemain. Grâce à notre passion et notre dévotion, nous ne sentons pas la fatigue. D’ailleurs, nous ne faisons pas ces statuettes pour gagner de l’argent. Ce n’est pas un business », confie Krishen. La fabrication d’une statuette nécessite entre cinq et six jours de labeur. La plus grande cette année mesure plus d’un mètre.

Terre humidifiée

Mais avant d’en sculpter une, il y a toute une préparation une quarantaine de jours en amont. D’après Ramma Chandrassen, une prière spéciale est récitée et la famille commence à observer un jeûne végétarien. Les sculpteurs passionnés récupéreront de la terre humidifiée à Baie-du-Cap. « Un jour, Parvati, l’épouse de Shiva, décida de créer une garde de taille humaine. Cette dernière devait garder la porte pendant qu’elle prenait son bain. Petit à petit, elle exfolia le safran de sa peau et sculpta son fils. C’est ainsi que Ganesh fut créé. Nous utilisons une terre spéciale », fera ressortir cet habitant de Saint-Julien d’Hotman.

Cette terre est ensuite nettoyée pour la débarrasser des détritus. Puis elle est pétrie. Enfin, les courbes généreuses de Ganesh sont délicatement tracées dans la pâte. « Cette année, j’ai reçu une quinzaine de commandes. Les statuettes que nous fabriquons mesurent de 16 pouces à plus d’un mètre. Nous travaillons dessus entre 20 heures et minuit tous les jours », confie Ramma Chandrassen.

Souvent, il se réfère à une photo pour sculpter le modèle de son client. La tendance cette année est l’effet brillant. Les dévots mettent aussi l’accent sur l’habillage des murthis de Ganesh. « Une fois la statuette séchée, nous procédons à la peinture et à la décoration. Les femmes cousent les vêtements de Ganesh et nous l’enjolivons avec des paillettes ainsi que des bijoux », ajoute-t-il.

Chez Seewanand Tannoo, la nouveauté réside dans la technique d’appliquer la peinture. Mais il ne compte pas dévoiler son secret. Il a commencé à travailler les statuettes depuis plus de deux mois. Il confectionne une douzaine de modèles cette année. Cet enseignant de profession travaille ses sculptures à partir de 18 heures quotidiennement.

« Chaque année, nous recevons plus de commandes que l’année précédente. Cela indique que les gens sont de plus en plus nombreux à célébrer Ganesh Chaturthi. C’est un grand moment de joie d’accueillir Ganapati chez nous », dit-il. Cet habitant de L’Espérance, Quartier-Millitaire, explique que le temps d’une soirée, des prières et des offrandes sont offertes à la divinité. Les dévots chantent et dansent toute la nuit. « Ganesh enlève les obstacles. Nous le vénérons pour le remercier de sa présence dans notre vie et avoir du succès dans plusieurs domaines. Le lendemain, l’idole est immergée. Ganesh prend tous nos problèmes avec lui et nous promet de revenir l’an prochain », conclut-il.