L’avenir est très sombre pour une vingtaine de collèges privés. Ils sont menacés de fermeture dans les trois prochaines années en raison de maigres admissions. C’est du moins ce que prévoit la Fédération des Managers des collèges privés. De son côté, la Managers of Private Secondary Schools Union réclame une répartition égale des élèves et une admission obligatoire dans les collèges privés.
Rentrée scolaire : Entre tristesse et appréhensions
Triste. C’est ainsi que Bashir Taleb, président de la Fédération des Managers des collèges privés, qualifie la rentrée scolaire pour les collèges privés. « Avec la fermeture du collège Presidency Boys et le collège Nelson qui se bat pour sa survie, il n’y aura donc pas de rentrée scolaire pour certains alors que pour d’autres, cela se fera avec très peu d’élèves en grade 7. C’est une triste rentrée. » Pour sa part, Neetesh Sewpal de la Managers of Private Secondary Schools Union, appréhende une rentrée scolaire quelque peu mouvementée. La cause serait la distribution des manuels scolaires des élèves des Grades 7 à 9. « Elle se fera à la rentrée et cela risque d’être ‘hectic’ tant pour les élèves, les parents et les enseignants. »
Le Taux d’admission en chute libre
Le nombre d’admissions dans les collèges privés est en baisse d’année en année. Une situation que déplore Bashir Taleb. « D’une part, les collèges privés obtiennent de moins en moins d’élèves et de l’autre, la capacité d’accueil dans les établissements de l’État augmente. Dans certains cas, ces collèges d’État prennent aussi des élèves avec des qualifications inférieures alors que jusqu’ici, ils étaient dirigés vers les collèges privés » Pour soutenir ses dires, Bashir Taleb indique qu’après l’exercice de « resit », le nombre d’admissions dans les collèges privés n’a quasiment pas changé malgré un nombre additionnel d’élèves sur le marché. Ce qui implique, selon lui, que ces élèves qui ont été repêchés après le « resit » ont aussi été absorbés par les collèges d’État.
Malgré une « baisse considérable » dans le nombre d’élèves dans les collèges privés, Neetesh Sewpal souligne : « Le nombre de classes pour le Grade 7 dans les collèges privés sera le même qu’avant mais avec certainement moins d'élèves dans chaque classe dans la plupart des collèges privés. »
Vers la fermeture de certains collèges
Cependant, cette situation ne date pas de cette année. Selon Bashir Taleb, si cette tendance se maintient, plusieurs collèges privés devront fermer leurs portes à l’avenir. « Dans les trois prochaines années, il se peut qu’une vingtaine des collèges privés cessent d’opérer. » S’il concède que « la Private Secondary Education Authority (PSEA) fermerait parfois les yeux sur des collèges qui n’ont pas les 175 élèves minimum nécessaires d’après la loi », il se demande si cela aide vraiment. « La PSEA ne fait que repousser l’échéance mais tôt ou tard, bon nombre de ces collèges seront fermés. »
Ces collèges d’État prennent des élèves avec des qualifications inférieures
D’où la demande de Bashir Taleb aux autorités de fermer des écoles qui ont des difficultés à obtenir le nombre d’élèves nécessaires d’après la loi pour opérer mais aussi les écoles considérées comme ‘substandard’. Il propose ensuite de conclure un partenariat, en écrit, avec les autres collèges restants afin que ceux-ci puissent continuer à être viables dans le temps. « Toutefois, la fermeture doit se faire dignement car il ne faut pas occulter l’apport de ces collèges lorsqu’à un moment donné, l’État ne disposait que de quatre établissements. »
Traitement équitable
Une répartition égale des élèves et une admission obligatoire dans les collèges privés, allouée par le MES en fonction du choix parental et des résultats des élèves. C’est ce que réclame Neetesh Sewpal. « Dans le cas où un parent demande un transfert, les mêmes procédures devraient s’appliquer pour les collèges privés et les collèges d’État. C'est-à-dire à travers le MES et pour chaque élève pris, il faut le remplacer par un autre. Ce n’est qu’à ce moment-là que les collèges se retrouveront tous sur un même pied d’égalité. »
Des collèges en «high demand»
N’empêche que plusieurs collèges privés se retrouvent paradoxalement avec un nombre élevé de demande d’admissions. Un phénomène que nos interlocuteurs concèdent. C’est le cas notamment, selon Bashir Taleb, des collèges confessionnels catholiques. « Ces collèges fonctionnent de manière différente mais les autorités qui les gouvernent peuvent être comparées à celles de l’État, explique-t-il. Il y a aussi certains collèges privés non catholiques, à l’instar du Collège Imperial, qui jouissent d’une certaine réputation. Néanmoins et tôt ou tard, ces collèges finiront par se retrouver en difficulté. »
Pour sa part, Neetesh Sewpal attribue ce phénomène aux zones élargies. Ainsi, la proximité du transport en commun et de la gare routière serait un facteur majeur qui mènerait à une demande plus élevée dans certaines écoles que d'autres. « Si nous utilisons le même concept d'admission régionale/de proximité de résidence dans les écoles primaires que pour la réforme de 9-Year Schooling, les élèves auraient été répartis de manière égale. Sinon comment expliquer qu’un élève ait à voyager pendant une ou deux heures pour aller à l'école dans la même zone? »
Le manque d’investissements
Certains collèges privés seraient aussi réticents à investir. Ce qui pourrait expliquer, d’après Bashir Taleb, leurs difficultés à obtenir des élèves. « C’est en partie vrai qu’il y a des collèges privés qui n’ont pas voulu faire des investissements nécessaires pour améliorer leur situation. C’est donc compréhensible qu’ils subissent aujourd’hui les conséquences. Mais quid de ceux qui ont les infrastructures adéquates et qui ont consenti à de gros investissements mais qui éprouvent toujours des difficultés ? » Le problème proviendrait, dit-il, des collèges privés qui sont tombés dans un cercle vicieux. « Avec des ‘intake’ qui sont qualitativement pauvres, car l’État a tendance à s’accaparer les meilleurs élèves. Ce qui implique plus de problèmes relationnels, plus de problèmes à encadrer l’enfant et des résultats moyens pour les collèges privés. »
Le ministère compte-t-il regarder les collèges privés mourir à petit feu ?»
Neetesh Sewpal avoue que certains collèges privés ne seraient plus intéressés à investir davantage devant le déclin dans le nombre d’admissions. Il précise : « Cependant, les autorités ne font aucun effort pour protéger ces écoles non plus. C’est évident que les parents ne vont pas choisir ces établissements. Néanmoins, la majorité des collèges privés sont entièrement équipés et répondent aux critères de la PSEA dans tous les domaines. »
Le « mutisme » du ministère décrié
Le « mutisme » du ministère sur ce phénomène en dit long, estime Bashir Taleb. « Le ministère compte-t-il croiser les bras, laisser la situation empirer et regarder les collèges privés mourir à petit feu ? » Quant à Neetesh Sewpal, il affirme avoir informé la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun de ce problème. « Le mois dernier, elle a assuré qu’il y aura une rencontre avec les principales parties concernées, le directeur de la Private Secondary Education Authority (PSEA) et elle. Nous attendons toujours. »
Demande de rencontre avec le PM
Une rencontre avec le Premier ministre, Pravind Jugnauth. C’est ce que réclament une plateforme qui regroupe la Fédération des managers des collèges privés, le syndicat des Managers des collèges privés et les employés des collèges privés, entre autres. Une réclamation faite par le biais d’une lettre ouverte publiée dans la presse cette semaine.
Neetesh Sewpal précise : « Nous sommes optimistes et nous espérons avoir une réponse positive rapidement. Si tel n’est pas le cas dans les jours à venir, nous nous réunirons pour décider de la marche à suivre. »
Le nombre d’admissions réduit de moitié
Un nombre d’admissions en Grade 7 réduit de moitié en trois ans. C’est la situation d’un collège privé du Nord.
Selon le directeur de ce collège, la tendance dans les admissions est la même depuis ces trois dernières années. « Avant 2016, plus de 150 élèves étaient admis en Grade 7. Ensuite, avec l’introduction de la 9-Year Schooling, c’est descendu sous la barre de 100. Cette année, nous avons environ 75 élèves seulement. Ainsi, d’année en année, le nombre d’élèves alloués par le MES diminue. »
Il avance que son établissement était réputé pour être l’un des plus grands, en termes du nombre d’élèves. Il pointe du doigt ce qu’il considère de « pseudo régionalisation » avec la réforme de l’éducation « où des étudiants se retrouvent à faire plus d’une heure et demie de route pour venir à l’école ». « Cela décourage de facto les parents dont le domicile se situe à plusieurs dizaines de kilomètres de l’école obtenue », déplore-t-il. S’il indique que la survie de son établissement n’est pas menacée dans l’immédiat, celle-ci dépendra toutefois de la vision à long terme du gouvernement pour les collèges privés.
PSEA : «Pas de fermeture de collèges pour 2020»
Alors que des responsables de collèges privés dénoncent la baisse dans le nombre d’admissions, un préposé de la Private Secondary Education Authority (PSEA) dit s’étonner que d’autres collèges se voient, eux, dans l’obligation de refuser des élèves tellement les demandes sont nombreuses.
Plusieurs facteurs sont avancés par la PSEA pour tenter de justifier ce paradoxe. Le choix des parents serait l’une des raisons principales. Ces derniers optent plus pour les collèges régionaux que d’autres collèges privés. « Il y a aussi ce problème démographique dans le sens où il y a de moins en moins d’enfants », ajoute notre interlocuteur.
Une des solutions proposées par la PSEA aux collèges qui font face à des difficultés pour admettre des élèves, serait de diminuer le nombre d’élèves par classe. « De ce fait, les enseignants pourront accorder plus d’attention aux élèves. Les responsables doivent aussi s’assurer qu’une bonne ambiance règne dans l’établissement pour espérer obtenir de bons résultats. »
Quoi qu’il en soit, la PSEA ne prévoit pas de fermeture de collèges cette année à part celle du collège Presidency Boys pour cause de manque d’élèves. La centaine qu’il recensait a été transférée vers d’autres établissements proches de leur résidence. Il souligne : « Toute fermeture de collège se fait dans le dialogue et pas du jour au lendemain. Les responsables disposent d’ailleurs d’un moratoire d’une année avant de finaliser la fermeture ». Notons qu’un minimum de 175 élèves est requis par collège pour pouvoir légalement opérer.
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