Les inondations provoquées dans plusieurs régions du pays par les averses ont fait l’objet de débats dans l’émission « Au cœur de l’info » sur Radio Plus le vendredi 27 janvier 2023.
L’ancien directeur général de la Central Water Authority, Dev Auckle, est intervenu par téléphone durant l’émission. Il est d’avis que les pluies de ces derniers jours ne seront pas suffisantes pour sortir complètement de la crise liée à la sécheresse à laquelle est confronté le pays depuis novembre dernier. « Les récentes pluies ne suffisent pas à remplir les réservoirs », a-t-il dit.
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Il concède néanmoins qu’elles permettront de rehausser le niveau de l’eau des réservoirs et des nappes phréatiques. « Il faudra encore deux ou trois événements pluvieux pour que nos réservoirs se refassent une santé. Au cas contraire, nous resterons dans le rouge », considère-t-il.
Selon lui, des plans ont été élaborés depuis les années 80-90 pour la construction de barrages, que ce soit dans le Sud à Rivière-des-Anguilles, dans l’Ouest à Chamarel ou encore dans l’Est. « Le design pour la construction du barrage de Rivière-des-Anguilles a été fait depuis 2010-12. Je ne saurais dire pourquoi le projet n’a pas progressé. »
Barrages
L’hydrologue Farook Mowlabaccus abonde dans son sens. Il indique que la construction de plusieurs réservoirs a été planifiée dans les années 90. « Ces projets auraient dû être prêts au plus tard en 2040. Mais la construction du barrage de Bagatelle à elle seule a pris une vingtaine d’années à se concrétiser », déplore-t-il.
Pour ce qui est du barrage de Rivière-des-Anguilles, il estime que cela prendra au moins cinq ans avant qu’il ne soit opérationnel. « En attendant, nous ne pouvons qu’ériger un muret, capter l’eau, la traiter avant de la distribuer aux régions avoisinantes. »
Vassen Kauppaymuthoo se demande, pour sa part, si le retard dans la construction du barrage de Rivière-des-Anguilles ne serait pas dû à un problème politique. Il est d’avis qu’avec une moyenne de 3 400 millions de mètres cubes de pluie que reçoit le pays chaque année, la disponibilité de l’eau n’aurait pas dû être un problème.
Il faut, selon lui, bien définir les priorités. « Si nous pouvons réaliser le projet Metro Express en une année, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas résoudre le problème d’eau à Maurice. Pour ce faire, nous devons nous concerter », a-t-il expliqué.
Intensité
Pour Farook Mowlabucus, l’intensité des pluies qui se sont abattues sur Maurice n’a rien de surprenant. « Ce n’est pas la première fois que nous recevons des pluies qui engendrent des inondations presque partout », a-t-il dit. Il estime que ce sont les activités et les développements entrepris par les êtres humains qui ont exacerbé l’impact de ces pluies.
Prenant l’exemple de Port-Louis, l’hydrologue a évoqué les maisons construites à flanc de montagne, notamment à Vallée-Pitot. Ce qui, selon lui, augmente les surfaces perméables. « Lorsqu’il pleut, cela provoque davantage de ruissellements et les canaux doivent transporter plus d’eau », dit-il.
Farook Mowlabaccus montre du doigt la décision de recouvrir une partie du canal Le Pouce pour accueillir des marchands de la capitale. « Des pylônes ont été plantés dans le canal. Ils sont une source d’obstruction car ils retiennent les débris transportés par les eaux, augmentant ainsi le niveau de celles-ci. Sans compter les portes métalliques installées dans le canal qui ont le même effet », a-t-il fait ressortir, précisant néanmoins qu’il s’agit d’une bourde humaine qui peut être corrigée.
Dans ce même registre, Farook Mowlabaccus a déploré le fait que des habitations se trouvent à proximité de certaines rivières. « Il y a aussi ceux qui en construisent carrément sur les drains existants. Ou encore ceux dont les maisons se trouvent en dessous du niveau de la route. » Il se demande s’il ne faudrait pas revoir la conception des drains pour répondre aux exigences actuelles.
Développement
L’océanographe et ingénieur en environnement, Vassen Kauppaymuthoo, a, quant à lui, fustigé certains développements fonciers qui ne tiennent pas compte de l’importance d’évacuer l’eau de pluie. « Un des premiers travaux qu’entreprennent des promoteurs est le nivellement du terrain sur lequel ils construiront. La présence des drains naturels n’est parfois pas prise en considération. Forcément, lorsqu’il pleut des trombes, la nature reprend ses droits », a-t-il souligné.
Il s’élève contre les permis accordés par les autorités pour des constructions qui se font dans des bas-fonds ou encore à flanc de montagne. « Nous nous concentrons, à tort, uniquement au développement. Il faut aussi se pencher sur l’évacuation d’eau », considère-t-il.
Parmi les solutions proposées par Vassen Kauppaymuthoo, il y a le transfert des habitants de certaines zones. « Il faut surtout que le gouvernement rende publique la liste des zones inondables. Une personne qui y habite pourra alors choisir de déménager pour ne pas mettre sa vie en péril ou alors décider de rester mais tout en assumant ses responsabilités », a-t-il précisé, ajoutant que la construction sur pilotis pourrait être une solution pour ceux qui veulent s’installer dans ces régions.
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