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Démolition des maisons : entre colère et désarroi

Démolition des maisons

L’idée de voir sa maison détruite est insoutenable. Pourtant, plusieurs personnes en ont récemment fait l’amère expérience. Si, pour certains, il existe quand même la possibilité d’avoir un meilleur logement, pour d’autres, cet événement est un réel traumatisme.

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«Les   autorités sont dépourvues de sentiments », martèle Jaywantee M., âgée de 65 ans. Cette habitante de Montée S, Camp-Benoît, est désemparée. « J’habite ici depuis ma naissance. Je ne suis pas mariée et j’ai bossé très dur jusqu’à mes 65 ans pour pouvoir construire une maison. Aujourd’hui, sans préavis, les policiers de la région me demandent de vider les lieux. C’est révoltant », pleure Jaywantee. « J’ai gagné ma vie comme bonne à tout faire. Ma maison est le fruit de plusieurs années d’économies. Je ne suis pas squatteur.

Ce terrain et cette maison m’appartiennent. Maintenant, à cet âge, on me demande de tout quitter. Qu’ai-je fait pour mériter ce sort ? Je ne sais pas où aller ? » ajoute la sexagénaire, la gorge serrée.

Jaywantee  a réclamé une compensation à l’État, basée sur la valeur marchande de son terrain et de sa maison, qu’elle estime à cinq millions de roupies. « On me propose un million de roupies. Je ne peux céder ma propriété pour un tel montant. C’est insuffisant. L’État ne fait preuve d’aucune compassion  envers les vieilles personnes. Les autorités sont sans cœur », déplore Jaywantee. La sexagénaire dit être impuissante face à cette injustice. « L’attitude spectatrice de certains ministres face au malheur du peuple, grâce à qui ils sont au pouvoir, me révolte », conclut-elle.

Témoignages

Jaysen : « Une triste épreuve »
Jaysen (prénom fictif) ne savait pas ce qu’il l’attendait quand il a quitté sa maison pour se rendre au travail, ce jour-là. Cet habitant de Résidences-Barkly ne s’attendait pas à perdre la tabagie de son père. « C’était le seul souvenir qu’il me restait de mon père… Ce que nous avons dû subir est triste », lance-t-il.

« Il y a environ 15 ans, mon père a utilisé ses économies pour construire ce commerce. Après sa mort, nous n’avons pas eu le courage de le raser, car il avait mis tout son cœur dans cette tabagie. Il l’avait équipée de plusieurs appareils. Or, lors de la démolition, le réfrigérateur et tout ce qu’il contenait ont été complètement broyés. »

Azam Rujubali : « Ma vie a été chamboulée en un clin d’œil »
Tout a basculé pour les membres de la famille Rujubali, quand ils ont assisté à la démolition de leur maison. « Ce bulldozer ne faisait pas que détruire des murs, mais transperçait mon cœur. Aujourd’hui, j’ai l’impression que toutes les parties de mon corps ont été éparpillées. Tout a changé. Ma famille a perdu le goût de vivre. Mon fils dort dans sa voiture.

Ma fille est chez une amie. Ma femme est tout le temps perdue dans ses pensées. Elle ne réagit pas. Nous sommes ainsi, car nous sommes toujours dans l’attente. Sans compensation, je ne peux pas entamer des démarches pour une nouvelle maison. J’ai perdu plusieurs effets lors de la démolition, car nous n’avons pas eu le temps de tout ramasser. Désormais, je suis un SDF », explique Azam Rujubali.

George P. : « Mon épouse et moi dormons sur la plage »
Cela faisait deux ans que George P., âgé de 52 ans, et son épouse habitaient La Butte. Ils y louaient une maison. « Le propriétaire nous a demandé de quitter les lieux, car la maison se trouve sur le tracé du Metro Express. Depuis plus d’un mois, mon épouse et moi dormons sur la plage de Pointe-aux-Sables.

Durant la journée, je vais chez un de mes proches, qui habite non loin, pour boire du thé et avoir quelque chose à me mettre sous la dent. Cette famille vit déjà à l’étroit et ne peut nous héberger pour la nuit. Donc, le soir venu, mon épouse et moi, nous nous rendons à la plage munis d’une natte et d’un molleton. Quand il pleut, nous nous abritons sous un arbre », relate George P.

Questions à Anishta Gunesee, psychologue : « Il faut accepter et avancer dans la vie »

Quel impact psychologique peut avoir la démolition d’un logement sur ses occupants ?
C’est très dur pour quelqu’un d’assister impuissant à la démolition de la maison dans laquelle il s’est investi financièrement, physiquement et émotionnellement. C’est une scène insoutenable de voir le fruit de toute une vie de dur labeur réduit en un tas de gravats.

C’est un traumatisme éternel. On a du mal à s’en remettre. Il faut tout recommencer à zéro. La personne a un sentiment de révolte face à son impuissance. Elle risque de devenir  négative, voire agressive, dans ses perceptions, ses actions et ses conversations.

Cela peut-il entraîner des problèmes de santé ?
Si une personne tourmentée après avoir assisté à la démolition de sa maison est laissée à son sort, elle risque de sombrer dans la dépression. De nombreux problèmes physiques, voire des maladies, sont liées à un état dépressif, notamment le cancer et l’obésité. Elle peut développer des problèmes digestifs, des palpitations, des maladies mentales, sans oublier la somatisation. Cela peut engendrer des troubles de la sexualité.

Que faire pour surmonter cette épreuve ?
Accepter les faits. C’est une des meilleures façons pour avancer dans la vie. Il faut surtout dédramatiser la situation et faire comprendre à la personne concernée qu’il y a quelque chose de mieux qui l’attend. À ceux qui ont du mal à surmonter leur traumatisme et dépression, je conseille un accompagnement psychologique.

 

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