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Concours de beauté : un défilé de polémiques

Manque de professionnalisme, favoritisme ou encore problème d’attitude. C’est ce que déplorent souvent certaines candidates qui participent aux concours de beauté. Chaque année, les polémiques font surface.

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Au moment de son élection, Ameeksha Dilchand avait 23 ans. Selon la jeune femme, c’est son moral d’acier qui l’a permis de remporter le concours Miss Mauritius en 2011. « On ne peut pas participer dans un concours pareil, juste pour vivre une belle expérience. Moi, je voulais à tout prix gagner et pour cela j’étais conditionnée à prendre des coups qui m’auraient permis de me perfectionner. Je pense qu’il faut savoir encaisser les coups et ne pas crier au scandale comme les candidates qui se sont désistées du concours Miss Mauritius », indique la directrice de Miss Supranational.

Comité organisateur

Ameeksha Dilchand est d’avis que le concours Miss Mauritius doit se réinventer.

N’empêche qu’Ameeksha Dilchand ne cache pas que le concours Miss Mauritius souffre d’un sérieux problème d’organisation. « C’est malheureusement un fait, parce que l’organisation de ce concours se fait un peu au petit bonheur. Il y a un manque accru de professionnalisme et de communication. Et c’est un peu malheureux, quand on sait que Primerose Obeegadoo, la présidente du concours, a le potentiel de mieux faire », dit-elle.

L’ancienne Miss Mauritius ne passe pas non plus par quatre chemins pour demander le renouvellement complet du comité organisateur. « Il faut virer tout le monde du comité organisateur de Miss Mauritius. C’est le seul moyen d’apporter un nouveau dynamisme à ce concours qui ne fédère pas la population mauricienne », estime-t-elle.

C’est d’ailleurs pour cette raison que les Mauriciens ne se bousculent pas non plus pour voter pour leur Miss à l’échelle internationale. « Très peu de Mauriciens vont voter pour leur Miss quand cette dernière participe à un concours international. La raison est simple, c’est parce que la population ne s’identifie pas à cette ambassadrice de charme. Et si ce n’est pas le cas, c’est parce que l’organisation n’arrive pas à galvaniser la population autour de ce concours qui a portant un aura national » , ajoute Ameeksha Dilchand.

Polémiques

Les polémiques ne sont pas le propre non plus du concours Miss Mauritius. D’autres concours semblent également être touchés. Du moins, c’est ce que nous a déclaré Preeti (prénom modifié) une ancienne candidate au concours Miss India Worldwide Mauritius. En 2015, elle a participé à ce concours et elle a très vite déchanté.

Selon elle, l’organisation de ce concours, n’est qu’une histoire de gros sous. « Il nous fallait trouver Rs 12 000 auprès de sponsors pour pouvoir poursuivre l’aventure. On nous avait fait comprendre que les recettes iraient à Cancer Association of Mauritius (CANMA), une association qui milite en faveur des personnes, souffrant du cancer. Cependant, au moment de verser cette somme, on ne nous a pas indiqué le compte de CANMA, mais le compte de la directrice de l’organisation. »

De plus, il s’avère qu’il y a une rupture de contrat quand l’organisation ne lui a pas fourni des vêtements et des chaussures, entre autres. « Le contrat stipule que l’organisation doit nous offrir des vêtements et des chaussures. Cela n’a jamais été le cas. C’est pour toutes ces raisons que moi et sept autres candidates avions claqué la porte de ce concours. »

Shalinee Peerthy, la directrice de ce concours, réfute ces allégations. « Il y a effectivement un cachet de Rs 12 000 que nous invitons les candidates à verser pour le compte de CANMA. Pour le faire, nous publions une brochure et nous invitons les candidates à aller trouver des compagnies qui veulent bien investir la somme de Rs 12 000 en termes de publicité dans cette brochure. À aucun moment nous n’exigeons que l’argent sorte des poches de nos candidates. »

Commentant, le compte bancaire sur lequel l’argent doit être versé, elle affirme que tout se fait dans la transparence. « L’argent est directement versé sur le compte de CANMA et nous disposons des documents qui peuvent l’attester. »

Idem pour les vêtements. « Il est faux de dire que nos sponsors ne prêtent pas des vêtements à nos candidates. Cela a toujours été le cas. »

Pour sa part, Priscilla Beegoo, avec quatre autres candidates, a eu à se désister du concours Miss Mauritius. Elle évoque plusieurs problèmes. « D’abord, l’organisation ne nous parle pas correctement. On a souvent été humiliées ! Et ce n’est pas toujours facile de vivre une pareille expérience. »

De plus les horaires sont rarement respectés. « Rien que pour une séance photo, on a passé une journée sur la place sans rien boire ni manger. Ce n’était vraiment pas évident de poursuivre l’aventure dans de pareilles conditions », explique la jeune femme.

Mais la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, c’est le talent show qui s’est tenu au Hennessy Park Hotel le 9 septembre. « Je trouve inacceptable que ce concours se soit déroulé en présence d’un jury qui n’avait aucune connaissance dans le domaine artistique. Cela a poussé quatre candidates et moi-même à claquer la porte. Pour le moment, nous avons envoyé une mise en demeure datée du 11 septembre à l’organisation, qui est restée sans réponse », dit Priscilla Beegoo.

Primerose Obeegadoo : « Personne n’a pu faire mieux »

Dans Le Défi Quotidien du mardi 12 septembre, Primerose Obeegadoo, présidente du comité organisateur de Miss Mauritius, a répondu à certaines critiques auxquelles elle fait face depuis que cinq candidates se sont désistées à deux semaines de la grande finale, le samedi 23 septembre.

« On ne participe pas au concours Miss Mauritius pour s’amuser, rigoler et faire passer le temps. C’est un concours sérieux. Ces cinq candidates n’ont pas confiance en elles. Elles se permettent donc de critiquer. Elles disent n’importe quoi et en plus, elles disent des choses qui ne tiennent pas la route », estime-t-elle.

Concernant le fait qu’elle soit membre du jury alors qu’elle est présidente du concours, Pimerose Obeegadoo fait ressortir qu’elle n’a pas le droit de voter. « Oui je suis membre du jury, mais sans aucun droit de vote. Je suis obligée de veiller à ce que tout se passe bien. J’ai une réputation à tenir. Mais je ne comprends pas pourquoi elles s’en sont prises aux membres du jury, car ces derniers sont des professionnels », dit-elle.

Et pas question pour elle, de se laisser décourager par les critiques ! Elle ne compte pas abandonner de sitôt la présidence du concours. « Cela fait 47 ans que le concours Miss Mauritius existe. Il n’est pas donné à tout le monde d’organiser aussi longtemps un concours de ce genre. Chacun est libre de faire ce qu’il veut.

S’il y a des gens qui veulent faire un concours de ce genre qu’ils aillent le faire. Toutefois, jusqu’à maintenant personne n’a pu faire mieux. Mais Primerose Obeegadoo a l’étoffe d’une organisatrice. Et avec mon équipe nous allons nous battre pour avancer et continuer sur notre lancée », précise la présidente du concours.

Lady Joyce Bacha, présidente de Mrs Mauritius : « Il n’y a pas de favoritisme »

Lady Bacha explique les difficultés d’un concours.

Cela fait six ans depuis que Lady Joyce Bacha organise le concours de Mrs Mauritius World et Universe à Maurice. C’est une tâche ardue, dit-elle. « Je me demande comment Primerose Obeegadoo a tenu 47 ans ! L’organisation d’un concours de beauté est éreintante. Il nous est d’abord difficile de trouver des sponsors, car aujourd’hui il y trop de concours. Les sponsors hésitent à investir », fait ressortir Lady Bacha.

Elle ajoute d’emblée que ceux qui soutiennent le concours attendent un retour d’ascenseur. « C’est pour cela que certains constituent le jury. Mais, il faut aussi qu’il y ait des professionnels du domaine sur le panel », soutient la présidente. Elle confie aussi que les sponsors prêtent une douzaine de vêtements, de chaussures et des accessoires, afin de jouir d’une meilleure visibilité alors que d’autres hésitent.

« Pour l’édition de cette année, nos candidates ont refusé de porter les robes prêtées. Elles trouvaient que les vêtements n’étaient pas beaux. Nous en avons parlé et elles ont toutes préféré confectionner leur propre robe avec leurs moyens », relate-t-elle.

D’ailleurs, elle fait ressortir que la communication est importante entre le comité et les candidats. « Le linge salle se lave en famille. J’ai la chance de travailler avec des femmes matures », fait-elle observer. Puis, elle fait ressortir que l’organisation d’un concours de beauté coûte les yeux de la tête. Elle fait comprendre que plusieurs centaines de milliers de roupies sont nécessaires pour réserver une salle pour les différentes épreuves, le transport des Miss et la diffusion sur la télévision nationale.

« Souvent le public ne veut pas payer le ticket à Rs 300 ou Rs 600 pour assister à la finale », confie-t-elle. Il faut de plus les frais de licence. « Un concours de beauté n’est jamais gratuit. Je paie plus de USD 500 pour la franchise. Chaque année, cette somme ne cesse d’augmenter. Il faut également payer le billet d’avion de l’élue et préparer ses valises », dit-elle.

Pourquoi les concours de beauté sont-ils aujourd’hui plus que jamais entachés par des polémiques ? « Ce ne sont pas des polémiques. Mais des palabres. Il faut toujours avoir les deux versions avant de trancher. Lors de la finale, certaines dauphines n’étaient pas d’accord avec les élues. Toutes les candidates pensent qu’elles méritent la couronne. Ce n’est pas faux. Mais il nous faut choisir celle qui est digne de représenter Maurice sur la scène internationale. Plusieurs critères sont pris en considération. Il n’y a pas de favoritisme », précise Lady Bacha.

Manjusha Faugoo ex-Miss International Mauritius  : « Je comprends la décision des cinq finalistes… »

Manjusha Faugoo, ex-Miss International Mauritius, qualifiée de «mentally unfit».

En septembre 2016, Manjusha Faugoo a fait la une de Le Dimanche/L’Hebdo. Elle a servi une mise en demeure au comité organisateur de Miss Mauritius. L’affaire suit son cours.
Élue Miss International Mauritius lors du concours Miss Mauritius, en 2015, Manjusha Faugoo devait défendre le quadricolore sur la scène de Miss International au Japon en octobre 2016. Mais elle n’a pas pu le faire. « Le comité a résilié mon contrat à quelques semaines du concours international. Il s’est attaqué à mes facultés mentales. Le contrat stipule que l’organisation a le droit d’enlever le titre d’une Miss s’il est prouvé qu’elle est “physically and mentally unfit”. Cela a été un des moments les plus difficiles de ma vie », explique-t-elle.

Cet événement a eu un impact négatif sur sa vie personnelle et sur sa carrière, car on a mis en doute ses facultés mentales. « J’ai participé au concours Miss Mauritius, car je voulais réaliser certains rêves. Je ne savais pas que je m’engouffrais dans un labyrinthe infernal. J’ai fait de nombreux sacrifices pour mériter une couronne. J’ai persévéré, malgré le mauvais traitement que j’ai subi durant le concours », raconte la jeune femme.

Manjusha Faugoo est aujourd’hui une des participantes de Miss Estrella Mauritius. Elle ne peut s’empêcher de comparer les deux concours. « À l’époque, le comité de Miss Mauritius comptait sur le soutien des sponsors. Où vont donc les matériels pour les Miss ? Mais à aucun moment nous n’avons reçu de produits et encore moins des séances de coaching et de “grooming”. Miss Estrella, pour sa part, investit dans ses prétendantes et nous sommes guidées par des professionnels », fait ressortir notre interlocutrice.

Aziz Patel : « Vouloir mourir sur scène n’est pas une bonne idée »

Aziz Patel organise Miss Réunion depuis 1994.

Aziz Patel organise l’élection de Miss Réunion depuis 1994. Le 26 août, il a couronné la 24e Miss Réunion, Audrey Chane Pao Kan. Il explique qu’un concours de beauté niveau national permet d’élire celle qui sera la meilleure ambassadrice possible pour son pays.

« Si un concours est bien organisé, il permet à des jeunes filles de vivre une expérience enrichissante, de profiter de certaines opportunités et pour certaines de poursuivre leur chemin dans le domaine de la mode et de la beauté », indique-t-il. Mais il n’est pas évident d’organiser un concours de beauté.

La première difficulté réside dans la recherche de sponsors. « Ensuite, il y a beaucoup de choses à organiser et à régler. Cela fait partie de l’adrénaline du concours. Tout doit être géré avec une information précise pour les candidates et avec une bonne équipe d’organisation », explique-t-il.

L’organisateur s’attend à ce que les finalistes soient motivées, livrent un beau spectacle pour la finale et gardent un bon souvenir de leur expérience. Les finalistes espèrent, elles, un bon encadrement, des conseils utiles et efficaces et une vraie neutralité.

« Elles veulent être encouragées et rassurées en permanence. Pendant le concours, les candidates ne doivent rien payer. Tout doit être fourni par l’organisation : tenues, chaussures, bijoux, coiffure et maquillage. Les sponsors qui s’engagent à fournir des produits ont l’obligation de le faire », fait-il ressortir.

D’après Aziz Patel, l’organisation doit prévoir à boire et à manger si les candidates se déplacent pour des séances de photos, des tournages ou encore des répétitions. « Nous le faisons à La Réunion pendant toute la préparation », souligne-t-il.

Il trouve normal que des sponsors composent le jury. Mais il est nécessaire de les briefer sur les critères de jugement. « En revanche, les membres du jury ne doivent avoir aucun lien de parenté ou de travail avec une candidate. L’organisateur et son staff ne peuvent pas en faire partie », précise-t-il.

D’ailleurs, Aziz Patel dit être courant de certaines polémiques entourant le concours de Miss Mauritius. « Plusieurs Miss Mauritius dont je tairai les noms m’ont déjà fait part de leur déception après coup. Je n’en dirai pas plus », confie-t-il.

L’organisateur de Miss Réunion soutient qu’il faut savoir partir à un certain moment. « C’est ce que je ferai le temps venu. Prenez l’exemple de Geneviève de Fontenay, l’ancienne présidente du comité Miss France. Aujourd’hui, elle a tout arrêté au niveau des concours de beauté. Vouloir mourir sur scène n’est pas une bonne idée », dit-il.

 

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