Explosion d’infox, communément appelée « fake news », sur les réseaux sociaux depuis le début de la campagne. Cela n’a jamais été autant le cas auparavant. Jusqu’à quel point ce flux d’informations, qu’il soit vrai ou pas, influencera-t-il les électeurs dans leur choix ? Le point avec des professionnels de la communication.
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Cette campagne électorale aura sans doute été celle durant laquelle l’utilisation des réseaux sociaux aura atteint son apogée. Et encore, Maurice aurait du retard à ce niveau-là, à en croire Javed Bolah, Chief Executive Officer (CEO) de Cerebro. « En 2008, les réseaux sociaux ont été le moteur de communication de l’élection de Barack Obama. Ce n’est que maintenant, soit 10 ans après, que le phénomène prend de l’ampleur à Maurice », explique-t-il.
En fait, poursuit-il, on n’en était qu’à la phase préliminaire durant la campagne précédant les élections de décembre 2014 : « C’était un avant-goût. D’ailleurs, depuis les dernières élections générales, le nombre d’utilisateurs sur les réseaux sociaux a presque doublé. » Il précise que le temps que passent les internautes sur les réseaux sociaux a lui aussi augmenté. Faire régulièrement un tour sur sa page Facebook, par exemple, est devenue quelque chose d’instinctif.
Javed Bolah explique que c’est justement parce qu’on peut toucher le plus grand nombre sur différentes plateformes en ligne que les campagnes de désinformation sont nombreuses. « La méthode One-to-One requiert beaucoup de temps et de ressources, alors qu’il suffit d’un clic pour qu’un post soit vu et partagé par des milliers de personnes », renchérit-il.
Mais ces fake news, aussi appelées infox, parviendront-elles vraiment à influencer le choix des électeurs ? Le CEO de Cerebro est d’avis que de nombreuses personnes ont déjà pris leur décision et que rien ne pourra leur faire changer d’avis, et ce peu importent les fake news qui pullulent sur la Toile. « Environ 50 % à 60 % de la population est indécise. Cela ne signifie pas pour autant que ces gens-là n’ont pas fait leur choix ou encore qu’ils sont dupes. Cela peut vouloir dire qu’ils prennent le temps d’analyser la situation », souligne-t-il.
Pour lui, l’explosion de fake news sur les réseaux sociaux n’aurait peut-être pas été la même si la campagne électorale avait été plus courte. « Certains espèrent qu’à force de répéter et de passer des images en boucle, cela s’ancrera dans la tête des gens », dit-il.
Vino Sookloll, directeur de FCB Cread, fait ressortir que s’il y a des personnes qui se laissent facilement influencer, d’autres réfléchissent. Et cela est valable en temps normal, pas seulement pour les élections générales, selon lui. « Il y a plusieurs types d’internautes. Certains sautent sur des informations, qu’elles soient vraies ou fausses, qui circulent sur les réseaux sociaux et les partagent. D’autres se contentent de like ces publications. D’autres encore ne feront que les lire. En réalité, cela revient au même », analyse-t-il.
Il est difficile, selon lui, de discerner le vrai du faux dans l’ère de l’information complexe dans laquelle nous vivons. « Aujourd’hui nous sommes dans l’instantané. Certains ne font que balancer des choses sur les réseaux sociaux pour voir comment réagissent des gens », indique Vino Sookloll.
Il trouve « déplorable » que tout le monde ne fasse pas l’effort de réfléchir, se laissant plutôt influencer par autrui. « Cela concerne surtout les indécis. Fake news ou pas, après discussions avec d’autres, certaines personnes peuvent se laisser influencer dans leur choix. Je prends l’exemple de quelqu’un qui doit acheter un téléphone portable mais qui n’y connaît rien. Il cherchera conseil auprès d’autres personnes. S’il décide de leur faire confiance, il achètera le cellulaire qui lui aura été recommandé. »
Raison pour laquelle il lance une mise en garde aux électeurs, leur demandant de faire preuve de vigilance. « La politique, c’est un peu comme la pub. Celui qui vend un produit, ou qui dans ce cas précis veut un vote, fera tout pour essayer de convaincre le maximum de personnes. On ne peut certes pas prendre la main de quelqu’un pour qu’il coche des croix sur son bulletin. Mais on peut l’influencer dans sa prise de décision », indique Vino Sookloll avant d’ajouter : « D’où l’importance pour les électeurs de faire preuve de discernement. »
Marie-Noëlle Elissac-Foy, consultante en relations publiques, estime que c’est déjà le cas : « Les électeurs font aujourd’hui davantage preuve de discernement. Ils savent que tout n’est pas la sacro-sainte vérité et qu’ils doivent prendre avec des pincettes les choses qui circulent un peu partout sur la Toile. » Ce qui la pousse à dire que les campagnes de désinformation n’ont pas une influence « majeure » sur les gens. « Ce n’est pas cela qui fera ‘vire’ ou qui débalancera la campagne », lance cette dernière.
La consultante concède qu’il faut faire attention aux Fake news et aux Deep fakes. Mais elle se dit rassurée que la culture de vérifier les faits s’installe à Maurice comme à l’étranger. Elle est convaincue que même si certains tomberont dans le piège, la plupart ont la tête sur les épaules et sauront séparer le bon grain de l’ivraie.
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