Bénévolat : Sheela, maman d’enfants «oubliés»

Elle s’est donnée pour mission d’accompagner quelques enfants perdus et rejetés afin de les guider dans les tortueux chemins de la vie. Sheela Mathur mène ce train de vie depuis plus d’un quart de siècle. Elle a pris le pari de prendre des gamins « oubliés » par la main.

Le combat de sortir de l’ornière des enfants rejetés par tous – la société, les parents et l’école – et de leur donner un semblant de goût à un sort déjà réglé pour beaucoup est devenu la maxime de Sheela Mathur. Souvent, avance-t-elle, ces enfants sont ballotés entre des parents absents ou fuyant leurs responsabilités, car devenus presque un fardeau pour ces papas et mamans qui ne le sont que de nom.

La pauvreté extrême nous saute aux yeux, bien que certains responsables semblent ne la découvrir que maintenant. « Cela fait peur rien que d’en parler. Les chiffres officiels ne veulent rien dire. La pauvreté extrême, il faut la vivre et pas juste en prendre note dans un bureau climatisé », estime Sheela Mathur.

La veuve de Raj Mathur, ex-Lecturer à l’université de Maurice, s’est donnée pour mission, avec Shakuntala Hawoldar et un groupe de jeunes universitaires, de prendre à bras-le-corps ces « délaissés de la société et d’essayer d’en faire des adultes responsables ».

L’ancienne enseignante du collège Lorette de Mahébourg explique ces enfants ne demandent pas grand-chose. « Ils attendent que les adultes daignent s’arrêter un bref instant pour prendre conscience de ce qui se passe autour d’eux. Ce petit geste vaut de l’or pour ces enfants, sachant que d’un petit rien peut germer tout un espoir, une autre façon d’appréhender les affres de la vie. »

Amour et accompagnement  

Ainsi, depuis plus d’un quart de siècle, Sheela Mathur prend son bâton de pèlerin à travers la Women Foundation for World Peace, organisation non gouvernementale (ONG) affiliée aux Nations unies. Les objectifs ? « Ils semblent à la fois simples et complexes, car ils touchent aux êtres humains dans leur quotidien et leur sensibilité », dit-elle.

En fait, s’occuper de 210 enfants issus de milieux divers demande de la dextérité. Pour cela, et Shakuntala Hawoldar et Sheela Mathur ont compris qu’il leur fallait d’autres « mamans » pour cette noble tâche. « Ces enfants ne demandent qu’à être aimés et accompagnés, et de prendre le meilleur d’eux pour en faire des citoyens. Pour ce faire, on a formé une vingtaine d’universitaires pour nous épauler », nous dit Sheela Mathur.

Chaque samedi, ces enfants, qui conjuguent leur présent au passé tellement ils en ont bavé, s’amènent dans une grande salle mise à la disposition de cette ONG au Mauritius Institute of Education. Au menu : devoirs académiques comprenant maths et tutti quanti. Puis les jeux, le théâtre, la lecture, la musique, la danse et les échanges.

Comme par magie, ces trois heures de classe ne sont que pur bonheur. « Cela nous fait plaisir de les voir répondre présent chaque samedi. Ce n’est plus une corvée pour eux, ni un fardeau comme à l’école. Chacun s’épanouit à son rythme. »

Dans cette classe du bonheur, l’ONG finance presque tout : matériel scolaire, sorties, journées sportives, frais du transport… Bref, pas d’excuses bidons pour s’absenter. And the house is full, dirait l’Anglais.

Toujours est-il que ces membres actifs de l’ONG et leurs universitaires ont compris que ces enfants perdus et oubliés sont récupérables. Peu importe l’extrême pauvreté qui jalonne leur vie et qui n’a presque plus d’emprise sur eux, ces enfants de la rue, des ghettos et des taudis peuvent se dire que quelque part, une main leur a été tendue comme pour leur permettre de gravir les échelons de la vie. Et se dire, comme Obama : Yes we can !