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Baisse des récoltes fruitières: les chauves-souris blâmées à tort

Il est faux de dire que seules les chauves-souris détruisent les récoltes fruitières. La Mauritian Wildlife Foundation vient de publier un rapport qui innocente ces mammifères volants. Toutefois, un comité spécial pourrait donner l’ordre de les chasser la nuit, selon le Native Terrestrial Biodiversity and National Parks Bill. Un sondage démontre que 80 % des Mauriciens sont contre l’idée d’exterminer les chauves-souris. « Oui, les chauves-souris détruisent les récoltes, mais ils ne sont pas les seuls responsables ». C’est en ces termes que le Dr Ryszard Oleksy de l’Université de Bristol a commencé son exposé, la semaine dernière. C’était au siège de la Mauritian Wildlife Foundation (MWF) à Vacoas. D’octobre à décembre 2014, il a visité quotidiennement le verger de Labourdonnais pour arriver à une surprenante conclusion. « J’étais au verger de Labourdonnais. J’ai d’abord porté mon étude sur les manguiers. Après mes recherches, je suis arrivée à la conclusion que 97 % des mangues en croissance périssent naturellement. Les 3 % qui demeurent produisent plus de 500 fruits. Sur ce pourcentage seuls 11 % sont ravagés par le Pteropus niger, chauve-souris endémique à Maurice. Alors que 19,5 % tombent à cause du vent ou encore parce qu’ils sont trop mûrs. Donc, il est faux de dire que les chauves-souris sont les seuls responsables ».

Mauvaise réputation

Pire, selon le Dr Oleksy, ce sont les oiseaux qui causent beaucoup plus de tort aux récoltes fruitières. « C’est ce que j’ai constaté. Il faut comprendre que les oiseaux s’attaquent principalement aux petits arbres et l’étude sur les litchis et les manguiers le prouve. Les chauves-souris ne se nourrissent pas principalement de fruits qui se trouvent sur les grands arbres. Mais comme les chauves-souris ont mauvaise réputation, on leur met tout sur le dos ». Étudiante à la Nottingham Trent University en Angleterre, Malikah Wachill, pour sa part, a profité de l’occasion pour présenter un sondage sur les chauves-souris. « Sur un échantillon de 560 personnes, nous avons appris que 75 % des Mauriciens ne savent que très peu de choses sur le Pteropus niger. Cependant, le paradoxe c’est que 80 % des sondés sont défavorables à ce qu’on extermine les chauves-souris. Avec le niveau d’éducation, cette tendance sera éventuellement revue à la hausse », dit-elle. Également présent lors de la présentation, le Dr Vikash Tatayah, le Conservation Director de la MWF, a émis des réserves sur la population des chauves-souris à Maurice. « On dit qu’il y a environ 50 000 chauves-souris. Or, c’est un peu tiré par les cheveux, étant donné que les chauves-souris peuvent se déplacer aux quatre coins de l’île en une même soirée, on peut compter la même colonie en différents endroits. Personne ne peut dire avec exactitude combien de chauves-souris compte Maurice, mais il y en a moins de 50 000 ». Il est même d’avis que ces mammifères sont en danger. « Nous avons découvert des centaines de chauves-souris mortes. Le rapport post-mortem a conclu qu’elles sont mortes de faim. Cette espèce ne met bas qu’une seule fois par an et elle est très vulnérable pendant les cyclones. Si on n’agit pas, il se pourrait que le Pteropus niger disparaisse comme les autres espèces de chauve-souris jadis endémiques à Maurice.»
 

La chasse: une mesure exceptionnelle

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3089","attributes":{"class":"media-image alignright wp-image-4429","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"395","alt":"Chauves-souris"}}]]Selon le ministre de l’Agro-industrie, Mahen Seeruttun, chasser les chauves-souris ne se fera qu’uniquement « si la vie des humains est en danger ». [blockquote]« Hence a section of the Bill will allow for a derogation to be made for hunting of wildlife at night in exceptional circumstances and where human life or national interests prevail ».[/blockquote] Le ministre devait renchérir que le Pteropus niger est une espèce protégée par la loi et que nous sommes signataires de pas moins de sept Conventions internationales (The United Nations Convention on Biological Diversity ; The Convention on International Trade of Endangered Species of Wild Fauna and Flora ; The Nagoya Protocol on Access to Genetic Resources and the Fair and Equitable Sharing of Benefits Arising from their Utilization ; The Convention on Migration of Wild Species ; The Ramsar Convention on Wetlands ; The International Union for Conservation of Nature ; and The African Eurasian Waterbird Agreement.) Conscient de la menace des chauves-souris sur les fruits, il rassure les parlementaires et la population que « l’abbatage de ces bêtes ne se fera pas sans la permission du ministre de tutelle et du directeur de ce comité s’il s’avère que la population de ces oiseaux de nuit augmente d’une façon exponentielle et que cela mette en danger la vie humaine et dans l’intérêt national ». Les défenseurs de la nature et les autorités, de même que les propriétaires de vergers de litchis et de manguiers ont des points de vue divergents sur la question.
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La décision du gouvernement mauricien de procéder à l'abattage de ces mammifères a fait le tour du monde. Et le Washington Post n'a pas manqué d'égratigner Maurice dans un article publié vendredi ayant pour titre The island that was once home to the Dodo wants to kill off thousands of protected bats. Le journal américain parle des propriétaires de vergers qui attribuent la baisse de leurs récoltes aux chauves-souris. Selon le Post, la décision de tuer 18 000 têtes met en danger cette espèce protégée. Il cite aussi la disparition du Dodo. « It wouldn’t be the first time human actions have threatened a Mauritian animal. Over the past few centuries, several species have disappeared from the island, the most famous of these being the Dodo, which was hunted to extinction by the beginning of the 18th century », écrit Chelsea Harvey.

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