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Baignade et alcool : un cocktail explosif

Consommer des boissons alcoolisées avant d’aller nager peut être un plaisir dangereux. Depuis le début de l’année, 16 cas de noyade ont été enregistrés. En 2016, ce drame a touché 42 familles. Parmi les principales causes, soit dans 60 % des cas, la consommation d’alcool arrive en tête de liste.

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Viraj Ramharai : «C’est dangereux de nager même si on a pris très peu d’alcool»

« C’est difficile pour les sauveteurs d’aider une personne qui a bu », indique Viraj Ramharai de l’International Life Saving Trainer. Il explique qu’une personne qui a consommé de l’alcool, même peu, ne se comporte pas de la même façon que quand il est normal. « Même si une personne n’a bu que modérément, il faut absolument éviter la natation. Il se met plus facilement en danger même dans des eaux a priori sûres, car il surestime ses capacités et il a tendance à être moins prudent. »

Quand le baigneur perd la balance et commence à se trouver en difficulté, ce n’est pas évident de le sortir de l’eau. « La personne a tendance à lâcher son corps et nous arrivons difficilement à le porter car son corps est beaucoup trop lourd », soutient Viraj Ramharai. « De plus la canicule n’arrange pas les choses. La chaleur renforce les effets néfastes de la boisson et ainsi, le corps élimine difficilement l’alcool. Au contraire, les effets sont plus rapides et conséquentes. »

Des problèmes circulatoires peuvent aussi résulter d’une trop grande quantité d’alcool dans le corps. « Si c’est un jour de canicule, cela peut provoquer des syncopes et il est plus difficile pour les secouristes de détecter des signes de détresse en raison de l’absence de réaction du baigneur », ajoute Viraj Ramharai. « Si par chance, nous arrivons à repérer la personne, elle devient parfois violente après le sauvetage. »

D’ailleurs pour sensibiliser la population à ce sujet, l’International Life Saving Trainer mène une campagne sur les plages de Maurice s’intitulant ‘Aprann sap to lavi dan delo’ « C’est simple : pour que la baignade reste un plaisir, il vaut mieux éviter de boire de l’alcool ! », conclut Viraj Ramharai.

Jimmy Rabaye : «Les vagues et l’alcool ne font pas bon ménage»

« Dans l’eau, un verre d’alcool consommé équivaut à trois verres sur terre », indique Jimmy Rabaye, skippeur à l’Ile-aux-cerfs et aux cascades de GRSE. Il explique cela par le mouvement des vagues et le dessèchement causé par le mélange d’alcool et la chaleur. « C’est très dangereux et ces éléments combinés augmentent les risques d’accident dans la mer et sur les bateaux car cela influence l’équilibre des passagers. »

Jimmy Rabaye affirme qu’il interdit de consommer de l’alcool à bord de son embarcation et même avant. « Si une personne insiste, j’éteins le moteur et je ne bouge pas. Pas question de démarrer même si les clients sont rois. C’est trop risqué ! »

Le skippeur rappelle que les conducteurs de bateaux ont des codes à respecter. « Si on se fait prendre avec des facultés affaiblies sur l’eau, nous risquons une sanction, c’est comme les codes de la route. Nous pouvons perdre notre permis. » Jimmy Rabaye se souvient d’ailleurs du drame de Grande-Rivière-Sud-Est. « Une policière, un policier et deux enfants ont péri quand l’embarcation, à bord de laquelle il y avait 16 personnes, a chaviré. La fatigue, le soleil, le vent et les mouvements de l’embarcation engourdissent déjà les sens. Quand l’alcool y est ajouté, vous devinez la gravité ? »

Jean Stephen Bothille : «L’alcool n’est pas indispensable à l’amusement»

« Les Mauriciens associent trop l’amusement à l’alcool », regrette le chef inspecteur, Jean Stephen Bothille de la National Coast Guard. Il soutient que de nos jours, il n’y a pas une fête ou une sortie où l’alcool n’est pas présente. « La présence des boissons alcoolisées dans tous nos divertissements est trop banalisée à Maurice », dit-il. « Même pour une journée à la plage, il semble que pour certains  pique-niqueurs, il n’y a pas d’ambiance sans alcool. » C’est aussi, dans ce contexte qu’une campagne de prévention nationale a été lancée par la National Coast Guard depuis le 4  mars afin de sensibiliser la population sur les précautions à prendre avant d’aller nager.

Selon Jean Stephen Bothille, l’excès d’alcool entraîne un certain nombre de conséquences comportementales. « En plus de l’agressivité et de l’irritabilité, la consommation d’alcool entraîne la prise de risque, voire l’insouciance. » Des attitudes qui peuvent engendrer de graves conséquences surtout à la plage. « En s’amusant, certaines personnes négligent leur responsabilité et baissent leur vigilance par rapport à leurs enfants. Ils les laissent sans surveillance et augmentent ainsi les risques de noyade. Il faut toujours désigner un adulte responsable pour superviser les enfants, sinon, on croit toujours qu’un autre s’en occupe. »

Lorsqu’un enfant se retrouve en difficulté dans l’eau, les parents et autres proches interviennent sans réfléchir. « Ils vont immédiatement se jeter à la mer même s’ils ne sont pas assez sobres pour le faire », indique Jean Stephen Bothille. « En essayant de sauver une vie (cela peut marcher, mais ce n’est pas sûr à 100 %), ils mettent leur vie en danger et ayant consommé de l’alcool, la personne n’a pas toute sa capacité, elle peut se noyer ou arriver trop tard. Il est donc préférable de ne pas boire. Si c’est le cas, il vaut mieux prévenir une personne sobre ou un secouriste au lieu de risquer deux vies. »


Noyade d'Aniket Nuckhir : témoignage d’une mère

Aniket Nuckhir s’est trouvé en difficulté dans un bassin à Nouvelle-France le lundi 27 février 2017 et il a péri noyé. « Kifer bondye ? Mo pas pe konpran ! » Ce sont les cris de douleur d’une mère meurtrie par le départ subit de son fils de 17 ans. « Je suis consternée, je ne m’attendais pas à une telle nouvelle. J’avais rendez-vous à l’hôpital, si je savais, je serais restée auprès de mon fils, j’aurais pu le sauver », se lamente-t-elle. « Ses amis m’ont dit qu’il avait gagné de l’argent dans un pari et qu’il avait bu avant de se jeter à l’eau. Je n’étais pas au courant de cette sortie. »

C’est en larmes que la mère d’Aniket décrit les derniers actes de son fils. « C’était un bon garçon, nous étions très proches, il gagnait bien sa vie et il sortait rarement avec des amis. Pourquoi est-ce qu’il est parti? », s’interroge cette mère inconsolable.

Bon nombre de Mauriciens aiment faire trempette après un repas bien arrosé. C’est la dernière chose à faire, ne cessent de répéter les autorités.


Autres mesures de sécurité

  • Favoriser les zones surveillées et fréquentées. Ainsi, en cas d’incident, les secouristes ou les personnes aux alentours peuvent détecter le signal de détresse et intervenir le plus rapidement possible.
  • Bien connaître et comprendre les indications. Les pancartes « Bain dangereux » autorisent la nage et autres trempettes mais avec précaution. Le panneau  « Bain interdit »… interdit les bains comme indiqué et il faut respecter les consignes.
  • Bien connaître la zone des bains et ses risques. Notamment s’informer sur les courants et les marées.
  • Attention à la météo.
  • Contrôler votre forme. Si vous vous sentez faible ou ressentez un trouble physique, ne vous baignez pas. Et ne consommez pas d’alcool avant ou pendant la baignade.
  • Attention aux enfants. Ne les laissez jamais seuls et batifolez dans l’eau avec eux. S’ils ne savent pas nager, équipez-les de brassards à leur taille.
  • Dans les lacs et les rivières. Ces zones sont peu surveillées. Il faut donc suivre les mesures citées ci-dessus et privilégier les zones aménagées pour la baignade.
  • En piscine, équipez vos piscines de dispositifs de sécurité. Utilisez des barrières ou des couvertures mais attention, cela ne remplace pas la surveillance des enfants qui doit, là aussi, être permanente. Gardez à proximité du bassin une perche et une bouée pour porter secours à quiconque est en danger ainsi qu’un téléphone pour appeler les pompiers ou le Samu.
  • Si on est en difficulté en mer, il ne faut surtout pas lutter contre le courant ou les vagues, on risque de s’épuiser. Il faut se mettre sur le dos, pour flotter. Ça dégage les voix respiratoires et permet d’appeler à l’aide. Dans le cas où on voit une personne en train de se noyer, le premier réflexe doit être d’avertir les secouristes. Attention, il ne faut pas forcément plonger pour aider la personne, surtout si on nage mal, si on n’est pas en forme ou si les conditions sont difficiles.
Source : National Coast Guard-chef inspecteur, Jean Stephen Bothille
 

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