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Après les échauffourées de vendredi - Gandia: l’épineuse question de la dépénalisation fait débat

La question de la dépénalisation du gandia anime les débats depuis le rassemblement de la communauté Rastafari, vendredi, à Port-Louis. Si beaucoup y voient une action répressive, d’autres, en revanche, estiment que la répression n’est pas la solution pour mettre un terme au fléau de la drogue. Les incidents qui ont éclaté, le vendredi 6 mai, entre des policiers et des membres du mouvement Rastafari ont remis sur le tapis le débat autour de la dépénalisation du cannabis. Le Premier ministre sir Anerood Jugnauth s’est, lui, montré sans équivoque à ce sujet : il n’est pas question de dépénaliser le gandia. De son côté, un porte-parole de l’association socioculturelle des Rastafaris explique que celle-ci étudie l’option d’envoyer une lettre au secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, Ban Ki-moon, qui est à Maurice, pour lui faire part de ses doléances. En attendant, pas de déclaration officielle de l’association dans l’immédiat. Le porte-parole explique que l’association s’appuie sur le fait que dans certains pays, il est autorisé d’avoir une certaine quantité de cannabis sur soi pour sa consommation. L’association compte solliciter une rencontre avec le Premier ministre.

Onze Rastas libérés

Des incidents ont éclaté, le vendredi 6 mai, entre des policiers et des membres du mouvement Rastafari, devant les Casernes centrales. C’est la présence d’un plant de cannabis en possession des membres du mouvement, alors qu’ils participaient, disent-ils, à un « rituel » lors de ce rassemblement, qui a provoqué une descente policière. Onze membres de la communauté Rastafari ont été arrêtés à la suite du rassemblement, qui s’est tenu au jardin de la Compagnie. Huit d’entre eux ont été arrêtés pour obstruction sur la voie publique. Les trois autres ont été arrêtés pour possession de cannabis. Ils ont été libérés, samedi, en attendant qu’ils fournissent chacun une caution, ce lundi, en cour. Certains membres de la communauté Rastafari disent avoir été « brutalisés ». Ce que le service de presse de la police nie.  
 

Ce que SAJ a dit

Sir Anerood Jugnauth (SAJ) a été sans équivoque quant à sa position sur la dépénalisation du gandia : « Tant que je serai Premier ministre, il n’est pas question de dépénaliser le gandia dans ce pays. » C’est ce qu’il a déclaré, dans la soirée du samedi 7 mai, au Taher Bagh, où il participait à un dîner organisé par le Haramayne Solidarity Movement. SAJ a rappelé que la consommation de gandia est illégale à Maurice. Une loi qui, dit-il, a été votée alors que le gandia était devenu un véritable fléau. Le Premier ministre a affirmé que quoi qu’il advienne, il ne cédera pas à la demande des Rastafaris. « S’ils ont un message à transmettre, il y a une façon de le faire. Me pa vinn dan plas piblik ek fer laprier avek gandia. Qui sa laprier la sa ? » s’est-il demandé. Il a aussi ajouté que « rasta pa rasta, tan ki lalwa-la ek pa sanze, ou bizin respekte. Et tant que je serai Premier ministre, il n’est pas question de dépénaliser le gandia dans ce pays. Le jour où cela arrive, je démissionnerai, car il n’est pas question que mon nom y soit associé », a expliqué le Premier ministre.  
 

Danny Philippe, coordinateur de Lead et travailleur social: « La répression n’est pas une solution »

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/div> Le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, a dit non à la question portant sur la dépénalisation du gandia. Qu’en pensez-vous ? On peut déduire de cette déclaration que le Premier ministre mise sur la répression. Or, ce n’est pas la solution. Tous les pays qui ont misé sur la répression n’ont pas eu les résultats escomptés. En revanche, ceux qui ont changé de politique et qui ont bougé vers la décriminalisation de certaines drogues ont eu des résultats positifs. Je prends l’exemple du Portugal. Cependant, il ne faut pas que la population s’alarme sur la dépénalisation du cannabis. Cela ne se fait pas à la va-vite. Il faut tout un accompagnement, voire un programme pour mener à bien cet exercice. Il y a 20 ans, j’étais moi-même contre cette idée. Aujourd’hui, j’ai changé d’avis en voyant comment la drogue a proliféré dans le pays, alors que la répression est de mise. Celle-ci n’est pas la solution et peut même être un gaspillage d’argent dans une lutte efficace contre la drogue. Maurice est-il prêt pour un débat sur la dépénalisation du cannabis ? Il faut bien lancer le débat. Les consommateurs de drogue représentent 70 % de la population carcérale. Un jeune universitaire, qui est emprisonné pour avoir consommé du cannabis, peut avoir une carrière brisée. Car cela figurera sur son certificat de caractère. Le problème est qu’il est difficile de trouver du travail avec cela sur son certificat de caractère. Que répondez-vous à ceux qui disent que le cannabis n’est qu’un pas vers les drogues dures ? C’est faux d’affirmer cela. C’est un mythe qu’il faut briser. Je ne suis au courant d’aucune étude qui est le démontre.  
 

La situation dans le monde

De nombreux pays et États autorisent l’usage thérapeutique du cannabis sous forme de médicaments : l’Italie, l’Allemagne, la Belgique, la Suisse, Israël, la Roumanie, la Slovénie, la Russie et plusieurs États des États-Unis. En Australie, le cannabis est illégal, mais décriminalisé dans quelques États, dont ceux qui se trouvent dans le Sud. Un ou deux plants peuvent être cultivés pour usage personnel. L’Uruguay est le premier pays à avoir légalisé le cannabis en 2013. Les usagers inscrits obligatoirement sur un registre peuvent en acheter 40 g par mois ou cultiver jusqu’à six plants chez eux ou s’en procurer par le biais de clubs de consommateurs. En 2014, la consommation et la vente de cannabis sont devenues légales dans le Colorado, État du centre des États-Unis. Les habitants peuvent acheter jusqu’à 28 g de cannabis. En Argentine, la consommation est légale pour l’usage personnel et modéré depuis 2009. La Cour suprême du pays a jugé qu’il était illégal pour le gouvernement argentin d’imposer des lois qui consistent à restreindre les choix de mode de vie de ses citoyens. Aux Pays-Bas, la possession, l’achat et la culture du cannabis sont illégaux, mais tolérés et réglementés depuis 1976. La vente est autorisée dans les coffee shops. En 2001, le Portugal a dépénalisé la possession de petites quantités de drogue pour une consommation personnelle. L’Espagne et la République tchèque ne reconnaissent pas comme un délit la possession ou la consommation de cannabis, sauf dans les lieux publics. Dans d’autres pays d’Europe, la détention est décriminalisée, mais reste pénalisée et les sanctions sont plus indulgentes pour les simples usagers.
 

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