Experte en bonne gouvernance, Alexandra Wrage, présidente et fondatrice de Trace International, était récemment à Maurice. Elle nous livre ses commentaires sur la fraude et la corruption, tant dans le contexte local qu’international.
Maurice a-t-il beaucoup à faire concernant l’adoption des pratiques de bonne gouvernance ?
Maurice ne se retrouve pas seul dans la lutte pour l’éradication de la corruption ou des scandales. La corruption représente un problème à l’échelle mondiale. Elle ne se limite pas à un seul domaine ou continent. L’essentiel pour le public, c’est qu’il soit rassuré que le scandale sera pris au sérieux par les autorités et qu’une enquête sera initiée pour punir les responsables de ces pratiques malsaines.
De plus, les personnes impliquées doivent être poursuivies. La récupération des fonds mal acquis est essentielle. Tant le gouvernement, que la société civile et le secteur privé, tous doivent travailler ensemble pour limiter les délits futurs, à travers des initiatives telles que l’e-procurement, les budgets plus transparents, le suivi des dépenses publiques par la société civile, et des incitations pour promouvoir les programmes de bonne gouvernance au sein de entreprises.
Les pratiques de bonne gouvernance sont-elles réservées aux seules grandes entreprises ?
La perception erronée est que seules les grandes compagnies sont astreintes à adopter les pratiques de bonne gouvernance. C’est faux. De nombreuses organisations et des pays ont publié des directives afin d’assister les Petites et moyennes entreprises (PME) concernant ces types de programme. Des rapports comme le TRACE ‘Global Enforcement Report’ compilent des informations sur les dernières tendances en ce qui concerne les pratiques anticorruption. Toutes ces ressources peuvent être utilisées pour concevoir des programmes de formation destinés à des secteurs d’activité spécifiques, des industries ou les interactions gouvernement/entreprises.
Quelles sont les implications d’un programme de bonne gouvernance ?
Un programme de bonne gouvernance efficient aide les entreprises à mieux se conformer aux lois et règlements dans le secteur d’activité où elles opèrent. Une entreprise ne disposant pas d'un programme de bonne gouvernance s’expose à d’éventuelles pénalités si elle est prise la main dans le sac. Elle risque aussi d’être confrontée à des enquêtes coûteuses.
Les dommages causés à sa réputation peuvent être élevés. Par exemple, en 2014, des entreprises ont payé plus de 1.5 milliard de dollars de pénalités aux autorités américaines. Ainsi, Walmart a versé plus de $600 millions aux autorités gouvernementales et s’est engagée à restructurer son programme de bonne gouvernance. Cela démontre l’importance accordée aux pratiques de bonne gouvernance au sein des entreprises aujourd’hui.
Comment apaiser les appréhensions des Mauriciens concernant la dénonciation d’une fraude ou d’une interférence politique ?
La protection des dénonciateurs (Whistleblowers) à travers des mesures gouvernementales est essentielle pour promouvoir la bonne gouvernance au sein des entreprises. Cependant, cela ne signifie pas que les entreprises doivent se contenter de ces mesures pour protéger les dénonciateurs.
Les firmes doivent tout entreprendre à leur niveau pour mettre sur pied un système permettant aux employés de signaler les actes de fraude, sans crainte de représailles. D’autre part, il est crucial que ceux qui appliquent les lois anticorruption restent indépendants et libres de toute interférence politique. Les entreprises et les citoyens doivent être convaincus que le gouvernement peut appliquer la loi objectivement et équitablement. L'ingérence politique délégitime les efforts des instances régulatrices et augmente le cynisme dans la communauté en général.
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