Interview

Alan Ganoo, du Mouvement Patriotique : «Le MP n’a pas d’agenda caché au no 18»

Alan Ganoo

À tous ceux qui distillent des rumeurs qui voudraient que le Mouvement Patriotique (MP) roulerait pour les travaillistes à la partielle au no 18, Alan Ganoo apporte un formel démenti. Son parti veut d’ailleurs créer la surprise en faisant élire sa candidate, Tania Diolle.

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Pourquoi le Mouvement Patriotique (MP) a-t-il finalement décidé d’aligner une candidate à la partielle du no 18 ?
Malgré notre jeune âge, le MP est un parti politique à part entière sur l’échiquier politique. Le MP est un parti dans l’opposition et il fait des propositions. Il aurait été insensé pour le parti de downplay un événement politique majeur.

Le MP était pourtant partisan d’un candidat unique de l’opposition. Changement de cap ?
On voulait auparavant soutenir un bloc politique. Après réflexion, il était trop tôt pour le MP de se prononcer sur son choix politique, loin des législatives. Et le choix final a été d’aligner Tania Diolle à la partielle.

Quelle est la particularité de Tania Diolle ?
Tania a une forte personnalité et le MP considère qu’elle peut faire une percée. Je pense sincèrement qu’elle créera la surprise, compte tenu de la situation politique et aussi eu égard à l’état d’esprit des Mauriciens, des jeunes en particulier.

Le MMM reproche au MP de vouloir puiser dans son réservoir électoral. Que répondez-vous à cette critique ?
Ces commentaires sont totalement faux et s’apparentent à un raisonnement insensé. Le MP n’a pas d’agenda caché. Ce que véhicule le MMM est très réducteur.

Le MP a-t-il le poids politique voulu pour diviser le vote des mauves au no 18 ?
Si on voulait réellement le faire, on aurait ouvertement accordé notre soutien à un autre parti et cela aurait été à l’avantage de celui-ci. Il n’est nullement dans notre intention de nous prêter à ce jeu-là. Il faut accepter le fait que les partis traditionnels ont un électorat acquis. Ce qui est nouveau, c’est le nombre grandissant d’indécis au no 18. Le MP a fait un constat avant de présenter Tania Diolle. Les électeurs du no 18 n’ont pas encore décidé pour qui voter. Il en est de même pour l’ensemble des Mauriciens qui ne s’identifient plus à aucun parti spécifique. La population a un ras-le-bol de la classe politique et des agissements de bon nombre de politiciens, surtout concernant les fausses promesses et le mauvais comportement au Parlement. Ils tiennent un langage outrageant, sans compter la corruption, les scandales, le népotisme et les passe-droits. Ils ont bafoué la confiance placée en eux par l’électorat.

N’empêche que le MP est tagué pro-travailliste au no 18...
Si tel était le cas, le MP aurait ouvertement accordé son soutient au PTr. Notre parti ne fait le jeu de personne. Ni du PTr, ni du Reform Party, de Roshi Bhadain. Tania Diolle représente le renouveau, la jeunesse, l’intégrité.

Le MSM devrait-il parti-ciper à cette partielle ?
Idéalement, le MSM aurait dû aligner un candidat. Raison pour laquelle le MP avait appelé à un candidat unique de l’opposition pour affronter celui du gouvernement. Nous comptions le soutenir après un consensus sur le candidat choisi. Cet appel est resté sans écho.

Ces députés ont souillé l’Assemblée nationale par leur comportement... C’est à une autre école et à une autre génération que nous avons affaire»

De quel parti de l’oppo-sition ce candidat unique aurait-il été issu ?
De n’importe quel parti et le gouvernement aurait eu une bonne raclée. Ce qui l’aurait forcé à changer sa façon de gouverner. La tendance veut que le gouvernement boude la partielle.

Et l’opposition qui joue le jeu du gouvernement en s’entre-déchirant…
Il y a effectivement une fragmentation des partis de l’opposition. Pire, on constate que la situation dégénère entre eux. Les attaques sont à peine voilées. Et ce, à l’avantage du gouvernement. L’opposition se trompe d’adversaire.

Chaque parti de cette opposition veut marquer des points…
C’est triste que, pour certains, la priorité est de privilégier leurs avantages et intérêts purement politiques sur d’autres considérations plus nobles. Ils voient en cette partielle une autoroute d’opportunités pour négocier, en position de force, une éventuelle alliance et se présenter en matamore pour un marchandage des meilleurs postes, afin de contrôler le pouvoir.

Est-ce que Roshi Bhadain fait le poids dans cette partielle ?
Roshi Bhadain doit tirer son propre boulet au no 18, après avoir provoqué cette élection de remplacement. Est-ce que Maurice avait besoin de cette élection ? Ou alors l’opposition aurait-elle dû conjuguer ses efforts pour obtenir des législatives ? Roshi Bhadain a tout eu sur un plateau. Il était député, Senior Minister, le blue-eyed boy de SAJ, et cela, alors qu’il y a des politiciens qui luttent des années durant pour pouvoir siéger au Parlement, afin de faire entendre leurs idées, mais n’y parviennent pas. Bhadain, lui, a craché dessus. Et il a le culot de venir demander à l’électorat de le réélire.

Vous avez été vu au-devant de la scène lors d’une fonction à Grand-Bassin, la semaine dernière, aux côtés d’Arvin Boolell et de Navin Ramgoolam. Des arrangements en catimini ?
Je n’étais pas le seul membre de l’opposition présent à cette fonction. Il y avait aussi Dan Baboo, qui représentait Xavier-Luc Duval, et Sundee Beedassy, membre du MMM. Je suis très proche des mouvements religieux. J’ai été l’un des trois ministres, en 2002, derrière le projet de statue géante du dieu Shiva. Cette fois, celle de la déesse Durga est à mettre au compte d’un autre groupe. Il n’y a rien de politique, j’ai parlé à Arvin Boolell deux minutes seulement. Une question de civilité, sans plus. De même qu’à Navin Ramgoolam et Dan Baboo. Ma présence à Grand-Bassin ne signifie en aucun cas qu’il y a rapprochement entre le MP et le PTr.

Abordons le volet de ce qui est qualifié de dérapages de certains politiciens. En vieux briscard de la politique, quel est votre sentiment ?
J’éprouve une profonde tristesse de voir le comportement de ces députés censés rehausser la dignité de l’institution suprême du pays. Ces députés ont souillé l’Assemblée nationale par leur comportement. Cela éclabousse la classe politique dans son ensemble. C’est à une autre école et à une autre génération que nous avons affaire.

Le Premier ministre aurait-il dû être sans pitié à l’égard de ceux qui ont fauté ?
L’Assemblée nationale devrait réfléchir à la création d’une structure pour se pencher sur un code d’éthique visant à stopper les agissements de certains. Pour ce qui est de Pravind Jugnauth, il a les mains liées. Sinon, il aurait pris des mesures. Quand vous pensez que Tarolah est encore PPS ! A-t-il menacé de démissionner comme député ?

Le PM aurait-il dû trancher dans le vif, malgré tout ?
Pravind Jugnauth, en dépit des chantages, n’aurait pas dû cautionner ces agissements. Il est prisonnier de son entourage et paiera cash pour n’avoir pas levé le petit doigt. C’est pour cela que certains députés cultivent le sentiment que tout leur est permis.

Dans cette conjoncture, quelle serait la meilleure alliance pour le pays ?
L’idéal n’existe pas et Maurice se trouve à la croisée des chemins. D’une part, le gouvernement a dilapidé son capital de sympathie et il lui sera difficile de remonter la pente. D’autre-part, la division de l’opposition s’accentue. Il est impossible, pour l’heure, de dire quel bloc politique constituera un gouvernement. Y aura-t-il un Printemps mauricien ? Pas avant deux ou trois ans.

 

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