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Affaire MedPoint - Me Robin Ramburn : «Les Law Lords doivent se baser sur les faits»

Chaque samedi, l’équipe de l’émission « Au cœur de l’info » décortique l’actualité de la semaine. Les divers invités apportent, au micro de Jean-Luc Émile et de Jugdish Joypaul, un nouvel éclairage aux débats en cours. Nous en reproduisons les extraits saillants.

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La Cour suprême a donné au Directeur des poursuites publiques (DPP) l’autorisation de contester devant le comité judiciaire du Conseil privé l’annulation du jugement de la cour intermédiaire condamnant Pravind Jugnauth. Qu’est-ce qu’une « leave to appeal » ?
Leave to appeal veut dire que le DPP n’étant pas satisfait du jugement de la Cour suprême, il demande la permission de faire appel. D’après ce que j’ai lu, vendredi, le DPP conteste le précédent jugement sur quatre points spécifiques, qui impliquent, entre autres, l’interprétation du droit et de la Prevention of Corruption Act.

En faisant appel, le DPP estime que la Cour suprême a mal interprété les faits ou que, sur ces faits, la loi a été mal interprétée. Il demande que la décision de cette instance soit reconsidérée.

Il se pourrait, par exemple, que les « Law Lords » trouvent qu’il y a eu mauvaise interprétation de la loi sur les conflits d’intérêts...
 Bien sûr. C’est la raison pour laquelle le DPP fait appel devant le Judicial Committee du Privy Council.

Au cas où les « Law Lords » donnent gain de cause au DPP, cela remettra-t-il en question le jugement de la Cour suprême ?
Si c’est le cas, cela va casser le jugement de la Cour suprême.

Dans un communiqué, les hommes de loi de Pravind Jugnauth soutiennent que le comité judiciaire du Conseil privé ne siège pas en appel sur les faits. En d’autres mots, il ne remet pas en cause les conclusions de la Cour suprême sur les faits. Quelle est votre lecture de la situation ?
Franchement, je ne connais pas tous les tenants et aboutissants de l’affaire en question. Comme tous les Mauriciens, je la suis à travers les journaux. Je suis mal placé pour faire des commentaires sur les faits. En tant que légiste, j’attire l’attention sur le fait que la Cour suprême s’est basée sur trois points saillants pour accorder l’autorisation au DPP. Elle parle d’éléments essentiels qui constituent des délits sous la Prevention of Corruption Act. Il y a des éléments de personal interest et de mens rea.

Est-ce que ce seul  élément de mens rea ne poussera pas les Law Lords à examiner les faits ? Autre question, est-ce que Pravind Jugnauth pouvait évoquer la bonne foi pour se défendre ? Parlant de bonne foi, est-ce que les Law Lords n’étudieront pas la conduite de ce dernier tout au long de ce dossier pour arriver à une décision ? Je serai étonné si les Law Lords ne s’intéressent pas aux faits, pour voir comment la loi est appliquée. Pour vous dire franchement, je ne comprends pas le communiqué des avocats de Pravind Jugnauth.

Donc, pour vous, le jugement du Comité judiciaire du Conseil privé pourrait avoir une incidence sur le jugement de la Cour suprême ?
Bien sûr qu’il aura une répercussion directe sur le jugement de la Cour suprême. S’il est en faveur du DPP, il fera jurisprudence.

Maneesh Gobin : « Pas question de ‘step down’ »

Comment le Mouvement socialiste militant accueille-t-il ce jugement ?
En tant que démocrates, nous accueillons ce jugement de la Cour suprême. Nous avons toujours défendu l’indépendance du judiciaire. Ce jugement autorise le DPP à demander l’avis du Comité judiciaire du Conseil privé sur un point de droit. Tout le dossier de l’affaire MedPoint sera repris et nous sommes sereins. Nous sommes convaincus de l’innocence de Pravind Jugnauth.

Cela dit, on entend les partis de l’opposition réclamer son retrait. Pour moi, la question ne se pose pas. Le step down de Pravind Jugnauth était d’actualité en 2015, suivant le jugement de culpabilité prononcé par la cour intermédiaire. Pravind Jugnauth a donné l’exemple en se retirant en tant que ministre, contre l’avis du parti. Par la suite, la Cour suprême l’a blanchi et il a été rétabli à son poste ministériel. à ce jour, il n’y a pas de jugement du Judicial Committee du Privy Council et la question de step down ne se pose pas.

Les partis de l’opposition avancent qu’il se pourrait qu’il y ait une décision invalidant ce jugement. Ont-ils tort dans leur interprétation ?
Il y a plusieurs jugements du Privy Council et de la Cour suprême de Maurice disant que le Judicial Committee n’est pas une seconde court of criminal appeal. L’appel est basé sur des points de droit. Le Privy Council travaille selon des principes différents, comparé à d’autres cours d’appel.

Après la démission de Roshi Bhadain, le MSM participera-t-il à la partielle dans la circonscription de Belle-Rose/Quatre-Bornes ?
Il est trop tôt pour dire quand aura lieu la partielle et qui sera le candidat. La démission est intervenue vendredi. Laissons le temps aux instances du parti de décider. Nous annoncerons notre décision en temps et lieu.

Les partis de l’opposition ne cessent de dire que le gouvernement est en perte de vitesse. Pensez-vous, que le MSM pourra affronter cette élection avec sérénité ?
Sans aucun doute. Les partis de l’opposition veulent faire croire que le gouvernement ne fait rien de bon. Nous avons du répondant. Moi, je crois dans la justesse de l’action gouvernementale.

Xavier-Luc Duval : « Pas une situation enviable pour le pays  »

Quelle est votre opinion sur le jugement de la Cour suprême accordant l’autorisation au DPP de faire appel devant le comité judiciaire du Conseil privé ?
D’abord, je félicite le judiciaire pour son jugement impartial. Cela nous donne raison, car nous avons quitté le gouvernement pour protéger les droits et les prérogatives du DPP. C’est un poste constitutionnel et il doit être totalement indépendant. Ce qui nous intéresse, c’est la finalité de cette affaire. C’est-à-dire, soit le Privy Council donne gain de cause à la Cour suprême et Pravind Jugnauth est innocenté, soit il confirme le jugement de la cour intermédiaire. Dans ce dernier cas, Pravind Jugnauth ira directement en prison. Donc, c’est une affaire très sérieuse.

Dans un communiqué, les avocats de Pravind Jugnauth soutiennent que cet aval ne remet pas en question la décision de la Cour suprême sur les faits. Qu’en pensez-vous ?
C’est exact, il ne peut se prononcer sur les faits, mais uniquement sur des points de droit. Ce faisant, le Privy Council doit décider si Pravind Jugnauth ira en prison ou non. Point à la ligne. Je dois faire ressortir que, dans le passé, plusieurs jugements de la Cour suprême ont été cassés devant le Privy Council. Donc, il y a un risque réel qu’il invalide ce jugement de la Cour suprême.

Lors de votre conférence de presse, vous avez parlé d’un Premier ministre en sursis et qu’il y va de la réputation de Maurice. Pensez-vous que Pravind Jugnauth aurait dû se retirer en attendant la conclusion de cette affaire ?
Depuis le début de l’année, il y a eu toute une série d’affaires qui ont choqué la population et maintenant, notre Premier ministre doit faire face à un procès devant le Judicial Committee du Privy Council. En tout cas, ce n’est pas une situation enviable pour le pays. [….].

Cela dit, on ne peut changer de Premier ministre chaque deux jours. Bien sûr, il n’est pas souhaitable qu’il fasse l’objet d’une action en justice,  mais est-ce réaliste de réclamer son retrait ? Il ne le fera pas. En janvier dernier, nous avons logé une affaire en cour contestant son accession au poste de Premier ministre en remplacement de son père. Il est évident que nous ne voulons pas de Pravind Jugnauth comme Premier ministre. Raison de plus, maintenant, pour dire qu’il doit partir.

Certains observateurs soulignent que le bureau du DPP est aujourd’hui sous la tutelle de celui de l’Attorney-General. Selon eux, c’est ce dernier qui doit faire les frais financiers de cette affaire. Est-ce logique ?
C’est un point très valable que vous avez soulevé. Il ne faut pas, d’une façon ou d’une autre, mettre des bâtons dans la roue du DPP pour qu’il n’aille pas de l’avant dans cette affaire. Tout le monde doit s’assurer que le DPP bénéficie de toutes les facilités voulues dans ce litige.

 

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