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Affaire Betamax : le Commissaire de police défie le DPP en Cour suprême

Le Commissaire de police a saisi la Cour suprême pour demander une révision judiciaire de la décision du Directeur des poursuites publiques (DPP) de prononcer un non-lieu en faveur des personnes inculpées provisoirement dans l’affaire Betamax.

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Une étape hors du commun a été franchie le jeudi 23 février. Le Commissaire de police (CP), Mario Nobin, a saisi la Cour suprême, d’une demande de révision judiciaire. Il conteste la décision du Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, de ne pas loger des poursuites au pénal contre « certains protagonistes » dans l’affaire Betamax. Le CP demande à la Cour suprême, la permission de contester ladite décision à travers une révision judiciaire (judicial review).

La demande a été faite, jeudi, par voie d’affidavit juré par l’inspecteur Ranjitsingh Ruchaia du Central Criminal Investigation Department (CCID). L’inspecteur fait valoir que le CP avait sollicité le DPP pour avis légal sur le dossier Betamax, le 16 novembre 2015. Cela, à la suite d’une enquête policière sur des délits allégués de faux, d’entente délictueuse et de corruption alléguée.

Contrat de Rs 10 milliards

L’inspecteur déclare que l’enquête policière a été initiée après réception d’une lettre datée du 12 février 2015 du secrétaire permanent du ministère de l’Industrie et du commerce qui a consigné plusieurs dépositions dans cette affaire.

Le CCID avait ouvert une enquête pour faire la lumière sur les procédures entourant l’octroi d’un contrat de Rs 10 milliards à la compagnie Betamax pour le transport des produits pétroliers entre l’Inde et Maurice. Cela sans l’aval du défunt Central Tender Board (CTB). Six personnes avaient été arrêtées : l’ex-Premier ministre Navin Ramgoolam, l’ancien ministre des Infrastructures publiques et du Transport, Anil Bachoo, le directeur de Betamax Ltd Veekram Bhunjun, l’ex-PS Reshad Hosany, Ranjit Singh Soomarooah, ex-directeur général de la State Trading Corporation et Kalindee Bhanji, ancienne PS au ministère du Business et des Entreprises.

Après enquête, la police a soumis le dossier au DPP. L’inspecteur Ranjitsingh Ruchaia explique que le DPP a retourné le dossier au commissaire, le 21 février 2017, avec une note du procès-verbal disant que « A no further action as been advised against all accused parties on 23 novembre 2016 ». Le policier ajoute qu’un communiqué du DPP en ce sens a été publié dans les médias le 23 novembre 2016.

Le DPP avait soutenu, dans son communiqué « after careful consideration of the evidence arising out of the investigation and in the light of the opinions of the senior officers, the DPP has decided that the case does not meet the evidential test of reasonable prospect of securing a conviction under the Guidelines for Prosecutors and has accordingly advised a no further action ». L’inspecteur Ranjitsingh Ruchaia affirme dans son affidavit que le CP se dit lésé par la décision du DPP. « Le DPP a choisi de donner son avis légal dans le domaine public avant d’en informer le commissaire de police. Ce faisant, soutient le policer, «cela a affaibli l'autorité du CP aux yeux du public et dans le fonctionnement du système de justice pénale». Ce qui constituerait « une irrégularité procédurale eu égard aux standing orders de la police ».

Sur la décision de prononcer un non-lieu en faveur des prévenus de l’affaire, le policier estime que le DPP a pris en compte « des considérations non pertinentes et a ignoré les considérations pertinentes telles qu'expliquées dans les lignes directrices du DPP lui-même sur les poursuites au pénal ».  L’inspecteur Ranjitsingh Ruchaia rappelle que l’affaire comporte « un intérêt public important, dans la mesure où des fonds publics sont en jeu dans l'attribution du contrat, objet de l’enquête policière ».  L’affaire sera bientôt appelée devant la Cour suprême. Le CP a retenu les services de l’avouée Me Saya Ragavoodoo.


Me Doorgesh Ramsewak, Queen’s counsel et ancien DPP : «La Cour suprême ne peut ordonner au DPP d’instituer une poursuite»

Sollicité pour une réaction, Me Doorgesh Ramsewak, Queen’s counsel et ancien DPP a déclaré que : « à ma connaissance, c’est la première fois qu’un commissaire de police réclame la révision d’une décision du DPP. Ce n’est pas une façon orthodoxe d’agir ». L’avocat explique que, pour réclamer la révision d’une décision du DPP, un citoyen doit y avoir un intérêt particulier et doit estimer cet intérêt lésé. « La Cour suprême a un droit de regard sur une décision prise par le DPP ou son bureau. Toutefois, elle ne peut ordonner au DPP d’instituer une poursuite au pénal dans une affaire. Cela irait à l’encontre du principe de séparation de pouvoirs. En revanche, la Cour suprême peut statuer que la décision a été prise sans respecter une procédure ou que la décision est irrégulière. La Constitution prévoit que seul le DPP est habilité à poursuivre un suspect au pénal ». Quelles sont les conséquences de cette action ? « Il est difficile de se prononcer à ce stade, je ne suis pas au courant des faits de l’affaire», dit-il.

 

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