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Abandon du projet de restitution des Chagos à Maurice : plaidoyer pour une approche multilatérale contre Londres

L’éventuel abandon du projet de restitution des îles Chagos à Maurice suscite des inquiétudes.

Dans un article publié le 1er décembre, « The Telegraph » laisse entendre que le Royaume-Uni aurait décidé d’abandonner le projet de restitution de l’archipel des Chagos à Maurice. Un plaidoyer émerge en faveur d’une approche multilatérale visant à faire pression, à travers l’ONU, sur le gouvernement britannique..

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Les réactions n’ont pas tardé après le récent article de The Telegraph dans sa livraison du 1er décembre 2023. Selon le journal britannique, le Royaume-Uni aurait renoncé à restituer l’archipel des Chagos à Maurice. Politiciens, membres de la communauté chagossienne et observateurs sont d’avis que l’approche multilatérale doit être adoptée face à cette situation. 

Selon The Telegraph, la décision du gouvernement britannique découlerait des inquiétudes de trois ministres quant à la préservation de la « relation spéciale » qu’entretient la Grande-Bretagne avec les États-Unis, qui hébergent une base militaire à Diego Garcia, et des intérêts de défense britanniques dans la région indopacifique. Ces préoccupations seraient partagées par les États-Unis, qui redouteraient que la base stratégique ne soit compromise si Maurice prenait le contrôle de l’archipel. La Chine, alliée de Maurice, entre en jeu dans cette équation géopolitique, étant en concurrence avec les forces américaines dans la région. 

Grant Shapps, Secrétaire à la Défense, s’oppose aux projets du ministère des Affaires étrangères de négocier un accord « à la chypriote », favorisant la souveraineté de Maurice, tout en maintenant le contrôle britannique sur la base américaine. Ignorant la position des Nations unies, Grant Shapps insiste pour que les îles restent sous contrôle britannique, rejetant le jugement de la Cour internationale de justice. 

Grant Shapps, Secrétaire à la Défense britannique, s’oppose aux projets du ministère des Affaires étrangères de négocier un accord « à la chypriote », favorisant la souveraineté de Maurice, tout en maintenant le contrôle britannique sur la base américaine. Ignorant la position des Nations unies, Grant Shapps insiste pour que les îles restent sous contrôle britannique, rejetant le jugement de la Cour internationale de justice.

Nando Bodha, ancien ministre des Affaires étrangères, n’est guère surpris. « L’attitude des Britanniques ne me choque pas », avance le député de l’opposition et leader du Rassemblement mauricien (RM). Il s’agit « d’une volte-face prévisible connaissant la ligne dure adoptée par les anciens Premiers ministres Boris Johnson et David Cameron, qui ont toujours été contre l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) ». 

Selon lui, les discussions bilatérales ont confronté Maurice aux « whims and fancies » du gouvernement britannique. « Ce simple fait a placé Maurice dans une situation de faiblesse », avance Nando Bodha. 
Cependant, ajoute-t-il, le pays peut toujours se tourner vers l’Assemblée générale des Nations unies, en brandissant l’avis consultatif de la CIJ. 

« L’ONU devrait mettre en forme cette plateforme multilatérale, ralliant tous les pays ayant voté en faveur de Maurice, afin de trouver une solution. Maurice devrait également déposer une motion en faveur d’un mécanisme multilatéral. Les États-Unis et le Royaume-Uni devront impérativement se retrouver à la table des négociations pour trouver un accord définitif, tout en respectant les jugements internationaux émis au fil des années », souligne Nando Bodha.

Même son de cloche du côté de l’observateur Faizal Jeerooburkhan. Le gouvernement devra se rallier derrière les instances internationales afin de réclamer justice dans le dossier Chagos, affirme-t-il. « Les arguments de Maurice auront plus de poids en raison de l’avis consultatif de la CIJ et de la résolution des Nations unies. Mais tout semble indiquer que le Royaume-Uni maintiendra sa position. Je suis d’avis qu’une bataille juridique internationale doit être enclenchée. En gros, ce sera une bataille d’arguments contre le pouvoir. Le Royaume-Uni, qui a les États-Unis pour alliés, pourrait remporter cette affaire. Maurice a également toutes ses chances. Si l’Inde considère Maurice comme étant un petit frère, le pays peut jeter sa force dans la bataille », propose Faizal Jeerooburkhan.

Cependant, Jean Claude de l’Estrac, ancien ministre des Affaires étrangères, est, lui, d’avis que Maurice devrait « négocier la restitution des autres îles de l’archipel des Chagos, comme Peros Banhos et Salomon, entre autres ». « Il faut faire une croix sur Diego Garcia. Il faut accepter le fait que Diego Garcia est perdu pour très longtemps », estime-t-il. Selon lui, Maurice pourrait ne pas percevoir d’indemnisation. 

« Nous sommes inquiets par rapport à la situation. Si le gouvernement britannique va de l’avant avec l’abandon du projet de restituer l’archipel des Chagos à Maurice, ce sera un mauvais exemple », soutient, pour sa part, le porte-parole du Chagos Refugees Group (CRG), Olivier Bancoult.Non seulement le gouvernement britannique est en train d’outrepasser l’avis consultatif de la CIJ, mais également la résolution des Nations Unies, fustige-t-il. « C’est un manque de sérieux, car les discussions avaient déjà été engagées avec le gouvernement mauricien. C’est malhonnête. L’histoire nous donne raison : le gouvernement britannique n’inspire aucune confiance », martèle Olivier Bancoult. 

Si l’abandon de l’éventuelle restitution de l’archipel des Chagos, comme annoncé par The Telegraph, s’avère, ce serait « un mauvais signal du gouvernement britannique et une grande injustice et un manque de respect envers le peuple chagossien », insiste le porte-parole du GRC

Pascalina Nellan (Chagossian Voices) : « Aucun changement de souveraineté sans processus démocratique »

« Le gouvernement mauricien doit mettre fin aux négociations et consulter la population chagossienne. Comme nous l’avons toujours demandé, nous voulons être consultés afin de déterminer si nous sommes favorables à un relogement ou non. Nous ne voulons pas de changement de souveraineté sans processus démocratique. C’est la raison pour laquelle un référendum est important. Les Chagossiens natifs, ainsi que leurs descendants, sont favorables à un relogement, mais à la condition qu’il soit sous la protection et la souveraineté britanniques dans l’archipel. Nous n’acceptons pas un changement de souveraineté. Les Chagossiens se sont rendus au Royaume-Uni parce qu’ils se sont sentis marginalisés. Nous craignons une braderie des îlots. »

Pravind Jugnauth évoquera le sujet avec le PM britannique

« Je ne ferai pas de commentaire sur un article de presse tant que le gouvernement britannique n’aura pas réagi officiellement. » Ce sont les propos du Premier ministre, Pravind Jugnauth, après que « The Telegraph » a rapporté, dans son édition en ligne, que le gouvernement britannique aurait décidé d’abandonner son projet de restitution de l’archipel des Chagos à Maurice. Pravind Jugnauth a toutefois souligné qu’il évoquera cet article au cours d’une prochaine discussion avec son homologue britannique. Il a fait cette déclaration lors de l’inauguration d’une route reliant La Brasserie, Beaux-Songes et La Vigie.

 

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