Entre l’élection partielle au no 18 en 2017 et l’échéance électorale de 2019, il coule de source que 2018 sera une année riche en opérations de séduction de la part de nos leaders politiques. Ils leur faut impérativement contracter une alliance pour remporter les prochaines élections générales. La quête du partenaire de circonstance ne sera pas une mince affaire.
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Sa complexité réside dans la rivalité exacerbée entre les partis de l’opposition lors de l’élection partielle du 17 décembre, qui a redistribué les cartes.
Le PTr joue à la surenchère
Surfant sur la vague de la victoire d’Arvin Boolell, Navin Ramgoolam donne l’impression de vouloir jouer au « lion » dominant dans l’arène politique. Il affirme que le PTr n’aura pas besoin d’allié pour la prochaine joute législative. Qui osera le croire ? L’Histoire témoigne que, depuis 1982, la victoire aux élections ne sourit qu’aux alliances. Paul Bérenger en a fait l’expérience à plusieurs reprises. De nature téméraire, le leader du MMM n’est pas un chat échaudé qui craint l’eau froide.
Alors, pourquoi Navin Ramgoolam bluffe-t-il ? Sa posture relève d’une caractéristique très connue des mâles dominants. Ces derniers se présentent droit dans leurs bottes et veulent imposer à tout prix les règles du jeu. Du coup, le leader politique qui désire flirter avec Navin Ramgoolam est conscient que les négociations ne se feront pas sur un pied d’égalité. Pas question d’un partage équitable des investitures, des ministères et ainsi de suite. Les mâles « Alpha » s’approprient la part du lion et laissent le strict minimum au partenaire soumis. En somme, Navin Ramgoolam joue à la surenchère pour que tout nouveau partenaire réduise au maximum sa liste de privilèges lors des éventuelles « koz koze ».
Cette position est un couteau à double tranchant. À force de trop rugir, le lion risque de faire fuir tous les prétendants, qui n’auront d’autres choix que de se réfugier au Sun Trust. Pour eux, c’est mieux d’être en alliance que de se faire écraser comme des fourmis dans un combat épique entre le PTr et le MSM. Ainsi, l’ambition de Navin Ramgoolam de présenter le PTr comme l’alternative du MSM s’écroulera comme un château de cartes. Cela pourrait être un deuxième mauvais choix tactique consécutif, qui s’avérera fatal pour les rouges.
Le MSM se prépare pour le grand jour
À l’issue du résultat de l’élection partielle, au MSM, on est conscient que le PTr, qu’on considérait au fond du gouffre, avec les déboires de son leader, commence à se refaire une santé. Imbécile, celui qui ne prend pas au sérieux cette menace, d’autant plus que Navin Ramgoolam a annoncé que le PTr minera le terrain. Vu que son gouvernement surfe dans le creux de la vague, Pravind Jugnauth n’a aucune raison de s’embarquer maintenant dans un délicat jeu de séduction. Son parti n’est pas prêt pour courtiser un partenaire.
S’il le faisait maintenant, Pravind Jugnauth serait en position de faiblesse, n’ayant pas de bilan à mettre en avant. Ainsi, il lui faudrait batailler dur pour avoir une majorité d’investitures, tout en ayant à faire, en contrepartie, une série de concessions. Dans la conjoncture actuelle, aucun leader politique n’accepterait de lui accorder le beurre, l’argent du beurre et la crémière.
C’est pour cette raison que le Premier ministre se donne deux ans pour soumettre l’alliance MSM-ML à une cure de jouvence. « Durant ces deux années (ndlr : 2018 et 2019) qu’il nous reste, vous verrez la différence entre 2014 et la fin de notre mandat », a affirmé Pravind Jugnauth. Ce n’est pas une bande-annonce, car le gouvernement exécute déjà un plan pour renverser la vapeur. L’objectif est de faire oublier la succession de scandales qui a terni l’image de l’alliance MSM-ML.
À ce jour, le fleuron de ce plan n’est autre que l’amélioration des salaires des Mauriciens, avec l’introduction du salaire minimal et la Negative Income Tax. Ce qui aura un effet boule de neige pour les autres couches sociales. Une série de mesures populaires sont à prévoir l’année prochaine. Au MSM, on est convaincu qu’avec ce changement pour le meilleur, le MMM et le PMSD vont être forcés de se faire la cour dès 2018, car on juge l’homme par ses œuvres.
Pouvoir de marchandage réduit du MMM
Situation cornélienne pour le MMM, qui doit forcément contracter une alliance crédible pour sa survie. Une quatrième défaite électorale consécutive aux législatives compromettra sérieusement l’avenir de ce parti. Compte tenu que le MMM ne pourra pas vaincre seul, il lui faudra trouver un partenaire. Tout comme Navin Ramgoolam, Paul Bérenger bluffe en déclarant que le MMM ira seul aux prochaines élections. Quand il annonce qu’il se présentera comme Premier ministre, tout le monde sait que c’est une voie suicidaire.
Alors, pourquoi adopte-t-il cette posture ? Dos au mur après la cinglante défaite de Nita Juddoo, Paul Bérenger n’ose pas concéder que son parti est en situation critique. Sinon, son pouvoir de marchandage sera réduit considérablement, à tel point que personne n’acceptera de lui accorder un fair deal. Valeur du jour, on voit mal comment le leader du MMM pourra débuter ses « koz koze on-off » en exigeant un partage du poste de Premier ministre et un nombre d’investitures équitables.
Le MMM a perdu son aura d’antan, avec une succession de crises. À ce jour, Paul Bérenger maintient qu’il ne compte pas flirter avec Navin Ramgoolam pour la troisième fois. En 1995, leur grand amour s’était soldé par une victoire, avant que le mariage ne soit rompu trois ans après. En 2014, leur remariage contre nature n’a pas été plébiscité par le peuple. Au MMM, on souhaite vivement qu’Arvin Boolell ravisse le leadership du PTr à Navin Ramgoolam pour pouvoir négocier une alliance PTr-MMM nouvelle version, la troisième.
Désillusion totale pour le PMSD
Le PMSD était sur sa lancée depuis la victoire de décembre 2014, avec 11 élus à l’Assemblée nationale, devançant le MMM. Sa cinglante défaite de décembre 2017 a ramené son leader, Xavier-Luc Duval, à la dure réalité. Il est encore trop tôt pour lui de positionner son parti comme la locomotive d’une alliance gagnante et lui-même comme prétendant au poste de Premier ministre. De toute évidence, si le PMSD compte retourner au pouvoir, il n’aura pas d’autre choix que de s’allier à un partenaire.
Cependant, la déconvenue de son candidat Dhaneswar Maraye, qui s’est classé en cinquième position, sans pouvoir sauver sa caution, constituera un gros handicap pour Xavier-Luc Duval lors des négociations. Les bleus ne pourront pas présenter une longue shopping list. Xavier-Luc Duval devra travailler très dur pour obtenir l’appréciation voulue auprès de ses compères leaders, surtout lorsqu’il est question d’alliance.
Somme toute, 2018 sera une année éminemment politique.
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